L’Union européenne donne un coup d’accélérateur aux traitements anti-Covid
En pleine cinquième vague de
Covid-19, l’Agence européenne des médicaments a approuvé, cet hiver,
l’utilisation de cinq médicaments anti-Covid. France 24 fait le point
sur ces traitements qui sont, pour le moment, administrés dans des cas
bien précis. Explications.
La
cinquième vague de Covid-19 frappe les pays européens, qui se voient
contraints de renforcer leur campagne de vaccination et qui prennent
tour à tour de nouvelles mesures restrictives. Dans ce contexte
inquiétant, l’Union européenne a autorisé, depuis le 12 novembre, cinq
traitements anti-Covid visant à compléter les campagnes vaccinales.
Jeudi
16 décembre, l’Agence européenne des médicaments (EMA) a approuvé deux
nouveaux traitements contre le Covid-19. « Cela porte à cinq le nombre de
médicaments autorisés dans le cadre de la stratégie thérapeutique de
l’UE, atteignant ainsi l’objectif que nous nous étions fixé dans notre
stratégie pour 2021 », a salué la commissaire européenne à la Santé,
Stella Kyriakides, alors que « la vague de Covid-19 continuera
d’augmenter dans toute l’UE au cours des prochains mois ».
Ces
autorisations concernent le Xevudy (sotrovimab) de la multinationale
britannique GlaxoSmithKline, le Kineret du Suédois Sobi, le RoActemra ou
Actemra produit par le laboratoire suisse Roche, le Regkirona de la
société sud-coréenne Celltrion et, enfin, le Ronapreve développé par la
biotech américaine Regeneron et commercialisé par Roche. France 24 fait
le point sur ces nouveautés thérapeutiques dans la lutte contre le
Covid-19.
Comment fonctionnent ces traitements ?
La
plupart d’entre eux sont des traitements par anticorps monoclonaux,
autrement dit des anticorps de synthèse. C’est une méthode connue et
déjà utilisée depuis de nombreuses années pour soigner des maladies
auto-inflammatoires chroniques ou certains cancers. « Les anticorps
monoclonaux sont des protéines synthétisées en laboratoire qui imitent
la réponse déclenchée par le système immunitaire pour combattre le
coronavirus. Ils ciblent la protéine ‘spike’ et empêchent ainsi le virus
de se fixer sur les cellules humaines », explique la Commission
européenne. Parmi eux se trouvent le Xevudy, le Regkirona, le Ronapreve
et le RoActemra.
Le 6 décembre, l’EMA a
recommandé d’étendre l’utilisation du tocilizumab, un anticorps
monoclonal vendu sous le nom d’Actemra ou RoActemra, pour soigner les
malades du Covid-19 les plus graves.
« Lorsqu’il
s’ajoute au traitement standard, il est efficace pour réduire le risque
de décès dû au Covid-19 et la durée d’hospitalisation des patients
atteints », peut-on lire sur le site Internet de l’EMA. Ce médicament,
utilisé pour traiter les formes d’arthrite de type inflammatoire, comme
la polyarthrite rhumatoïde ou l’arthrite juvénile, est aujourd’hui
réputé pour combattre l’emballement du système immunitaire qui semble
être la source des formes graves du Covid-19.
Le
traitement au Kineret, lui, est déjà utilisé pour soigner l’arthrite et
des maladies inflammatoires. C’est un médicament immunosuppresseur : il
empêche l’action d’un messager chimique impliqué dans les processus
immunitaires qui conduisent à l’inflammation. Il peut « empêcher le
développement d’une insuffisance respiratoire sévère chez les patients
atteints du Covid-19 », selon l’EMA. Son utilisation a donc été « étendue
au traitement du Covid-19 chez les patients adultes (…) ayant besoin
d’un supplément d’oxygène (…) et qui risquent de développer une
insuffisance respiratoire sévère ».
Qui peut en bénéficier ?
Pour
l’heure, les traitements autorisés par l’EMA ne sont pas prescrits à
grande échelle. Ils sont, pour la grande majorité, destinés aux
personnes fragiles, susceptibles de développer une forme grave de la
maladie.
Avant leur autorisation de mise sur le
marché, le Xevudy, le Regkirona et le Ronapreve ont fait l’objet
d’études poussées qui ont permis de préciser dans quels cas ils sont le
plus efficace. Par exemple, le Xevudy « réduit considérablement » les
hospitalisations chez les patients à risque. Il est donc « destiné au
traitement du Covid-19 chez les adultes et les adolescents qui n’ont pas
besoin d’oxygène supplémentaire et qui présentent un risque accru de
gravité de la maladie », a précisé l’EMA. C’est aussi le cas pour le
Regkirona. En revanche, RoActemra est préconisé pour les patients
adultes qui ont besoin d’oxygène supplémentaire ou d’une ventilation
mécanique.
Sous quelle forme les trouve-t-on ?
Pour
l’heure, en Europe, ces cinq médicaments ne sont pas disponibles sous
forme de cachets. Ils sont administrés par perfusion intraveineuse ou en
injection sous-cutanée, ce qui rend leur usage moins pratique. Mais
deux pilules, le Paxlovid de Pfizer et le molnupiravir de l’Américain
Merck, suscitent des espoirs. Contrairement aux anticorps monoclonaux,
ces deux médicaments sont des antiviraux : ils diminuent la capacité du
virus à se répliquer et freinent la maladie. L’EMA a approuvé
l’utilisation en cas d’urgence du Paxlovid sans lui accorder une
autorisation complète de mise sur le marché européen. Concernant le
molnupiravir (commercialisé sous le nom de Lagevrio), l’EMA a laissé les
pays membres se prononcer individuellement sur son utilisation. Jeudi,
le Danemark est ainsi devenu le premier pays de l’Union européenne à
autoriser le molnupiravir pour les patients à risque présentant des
symptômes.
Lesquels sont autorisés en France ?
En
France, la Haute autorité de santé (HAS) a refusé d’autoriser le
molnupiravir sur son sol, ne le jugeant pas assez efficace et lui
préférant le Ronapreve. Ce dernier, qui combine deux anticorps
monoclonaux, est utilisé chez des patients atteints du Covid-19 et
hospitalisés. Ce médicament peut être prescrit aux patients non intubés
et qui n’ont pas développé leurs propres anticorps. Par
ailleurs, ces anticorps monoclonaux sont chers à produire. « Le coût de
ces anticorps est élevé en raison d’un mode de production faisant appel
aux biotechnologies et reposant sur un procédé de multiplication
artificielle in vitro, à partir d’anticorps naturels, par des bactéries
ou des cellules sélectionnées pour leur aptitude à produire un anticorps
particulier », explique le ministère français de la Santé.
Le
10 décembre, la Haute autorité de santé a aussi donné son feu vert au
traitement Evusheld du laboratoire AstraZeneca, sans attendre, cette
fois, la décision de l’EMA. Le médicament doit toutefois être utilisé en
accès précoce et est destiné aux adultes « à très haut risque de forme
sévère du Covid-19 qui sont mal ou pas protégés par la vaccination et
ceux qui n’y sont pas éligibles », écrit la HAS.
Sont-ils efficaces contre le variant Omicron ?
Comme
pour les vaccins, des doutes subsistent sur l’efficacité de ces
traitements face au variant Omicron, comme l’a expliqué au journal
Libération l’immunologiste Laurence Weiss. Concernant le Regkirona, par
exemple, « il s’agit d’une monothérapie [un seul type d’anticorps] avec
un risque théorique d’échappement au traitement et qui perd son activité
face à Omicron, tout comme le Ronapreve ».
Toujours
au sujet des traitements monoclonaux, ils ne « remplacent en aucun cas
la vaccination mais permettent de protéger les patients immunodéprimés
ou les rares personnes qui ne peuvent pas se faire vacciner. Par
ailleurs, on peut anticiper que le cocktail AstraZeneca [Evusheld]
devrait être efficace sur le variant Omicron, mais ça reste à
démontrer », a-t-elle ajouté dans un entretien au journal 20 minutes.
Pour sa part, le laboratoire GSK a affirmé que son médicament anti-Covid
« conserve une activité in vitro » contre le variant Omicron.