Au Mali, Florence Parly tente de réduire les tensions avec les militaires
Le déplacement au
Sahel de la ministre française des Armées, Florence Parly, entamé au
Niger, vise notamment à exposer aux pays concernés la réorganisation
engagée depuis janvier 2013 par la France dans la région. Celle-ci a
notamment affirmé, lundi, la détermination de Paris à poursuivre son
engagement au Mali.
La
ministre française des Armées Florence Parly a affirmé, lundi 20
septembre, au Mali, la détermination de Paris à y poursuivre son
engagement, sans obtenir d’assurances du gouvernement dominé par les
militaires sur une éventuelle coopération avec le groupe russe Wagner.
La
communauté internationale s’inquiète aussi du peu d’empressement
manifesté par les colonels, qui ont renversé le 18 août 2020 le
président Ibrahim Boubacar Keïta, à organiser des élections pour rendre
le pouvoir aux civils en février 2022.
Lors
de sa rencontre avec le ministre malien de la Défense, le colonel Sadio
Camara, Florence Parly a dit avoir abordé le dossier Wagner et « insisté
sur le fait qu’au moment où jamais la communauté internationale n’a été
aussi nombreuse à combattre le terrorisme (au Sahel), un tel choix
serait celui de l’isolement ».
« Il
faut que chacun soit bien conscient des conséquences » d’une coopération
avec la société russe, a-t-elle indiqué aux journalistes dans l’avion
qui la ramenait en France, précisant que le colonel Camara lui avait
assuré qu’aucune décision n’avait encore été finalisée.
Risque d’une détérioration des relations entre l’UE et Bamako
Dans l’entourage du ministre malien de la Défense, on confirme à l’AFP « qu’aucun acte n’a été posé avec Wagner. Aucun acte ».
Le
ministre a expliqué à son homologue française que « l’abandon de la
France obligeait à tout envisager pour sécuriser le pays », selon cette
source. Ce à quoi Florence Parly lui a répondu que « la France
n’abandonnait pas le Mali », a-t-on précisé.
Pour
sa part, le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, a mis en
garde contre le risque d’une détérioration des relations entre l’UE et
Bamako en cas d’implication au Mali du groupe privé russe Wagner. « Cela
affecterait sérieusement la relation entre l’UE et le Mali », a-t-il
affirmé.
La
France et l’Allemagne avaient prévenu, la semaine dernière, qu’un
recours à Wagner pour former les forces armées maliennes et assurer la
protection des dirigeants remettrait en cause leur engagement militaire
au Mali.
Le
gouvernement malien avait rétorqué qu’il ne permettrait « à aucun État
de faire des choix à sa place et encore moins de décider quels
partenaires il peut solliciter ou pas ».
Ce
déplacement de Florence Parly, entamé dimanche au Niger, visait
notamment à exposer aux pays concernés la réorganisation par la France,
engagée depuis janvier 2013 au Sahel, de son dispositif au profit d’une
présence resserrée, centrée sur les frappes ciblées contre les chefs et
cadres jihadistes et l’accompagnement des armées locales.
« Coup décisif »
« Depuis
huit ans, la France a fait le choix d’être continuellement aux côtés du
Mali, de gagner mais aussi de souffrir avec lui », a déclaré Florence
Parly à l’issue de sa rencontre avec son homologue, en référence
notamment à ses 50 soldats morts au combat.
« Il
est temps de faire évoluer notre dispositif », a-t-elle dit, alors
qu’est programmée l’évacuation des bases de Kidal, Tessalit et
Tombouctou pour un recentrage sur la « zone des trois frontières », aux
confins du Niger et du Burkina Faso.
Mais
la France, consciente que la situation « reste fragile » sur le plan de
la sécurité, « reste déterminée à travailler avec les Maliens pour
continuer cette lutte qui nous unit », a assuré la ministre. « Nous ne
quittons pas le Mali », a-t-elle insisté.
Au
même moment, quatre militaires maliens étaient tués par l’explosion
d’un engin dans le centre du pays, près de la frontière avec le Burkina
Faso, au passage d’un convoi d’évacuation médicale d’un officier blessé
dans une précédente attaque, selon l’armée malienne.
« Nous
restons présents et nous venons de le prouver à nouveau dans la zone
des trois frontières », a par ailleurs rappelé la ministre française,
qualifiant de « coup décisif » porté au groupe État islamique au grand
Sahara (EIGS) la mort à la mi-août, mais annoncée la semaine dernière,
de son chef Adnan Abou Walid al-Sahraoui.
Dans
cette région régulièrement touchée par les attaques, la présence de
jihadistes affiliés à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) ou à l’EIGS
s’est greffée sur des tensions qui existent de longue date entre
communautés, ainsi que sur les carences et défaillances de l’État.
« Nous
avons besoin de nous assurer qu’il y a une volonté ici au Mali
d’appuyer la Cédéao pour faire aboutir ce processus de transition
politique, ce retour vers la démocratie, la bonne gouvernance et la
justice, qui sont seuls à même de créer les ressorts qui permettront au
Mali d’affronter les défis du terrorisme islamiste », a également déclaré
Florence Parly.
La
Cédéao (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest, 15
pays) a prévenu que l’échéance de février était « non négociable » et
exige des autorités de transition, d’ici à la fin du mois d’octobre, un
calendrier des étapes essentielles avant les élections.
Les
effectifs français au Sahel devraient passer de plus de 5 000 hommes
actuellement à « 2 500 ou 3 000 » d’ici 2023, selon l’état-major.