11-Septembre: 20 ans après, le World Trade Center entre commémoration et reconstruction
En quelques heures ce 11 septembre 2001, les tours jumelles du
World Trade Center de New York s’effondrent, frappées par un double
attentat terroriste. Vingt ans plus tard, la vie a repris sur le site,
et l’architecture des nouveaux lieux n’y est pas étrangère.
Les
ouvriers sont à l’œuvre, les camions de chantiers défilent, des grues
de plusieurs centaines de mètres parsèment ce paysage vertical. Un
travail de fourmi tant le lieu est gigantesque. De nouvelles tours se
construisent à Ground Zero depuis déjà plusieurs années. Trônant dans ce
perpétuel chantier, le One World Trade Center, le gratte-ciel qui a
remplacé les tours jumelles. Le projet démarre en 2005. Inauguré en
2014, le plus haut bâtiment des États-Unis donne le vertige : la Freedom
Tower (comme elle était autrefois appelée) tour de verre de 541m, 104
étages, est transpercée par les rayons du soleil qui lui donnent un
aspect hors du commun ; quelques nuages l’auréolant de part et d’autre.
Peut-être
un signe en mémoire de toutes les victimes du 11 septembre 2001. Ce
jour-là, deux avions de ligne percutent les tours jumelles. Un autre
éventre le Pentagone, avant qu’un quatrième ne s’écrase dans la campagne
avant d’avoir pu atteindre sa cible – le Capitole, selon toute
vraisemblance. L’attaque est menée par des terroristes d’al-Qaïda. Près
de 3 000 personnes meurent ce jour-là dans ce qui est considéré comme
l’attentat terroriste le plus sanglant de l’Histoire.
Retrouver la lumière
«
L’objet principal de ce One World Trade Center est la lumière. Son rôle
est de créer un faisceau lumineux qui va marquer le site dans le ciel.
C’est une tour qui va toujours interagir avec la lumière », confie Rami
Abou-Khalil du cabinet d’architecture et d’urbanisme SOM, qui a
construit les plus hautes tours du monde, dont la célèbre Burj Khalifa,
et qui est à l’origine du One World Trade Center.
La
construction des nouvelles tours sur le lieu du drame entend symboliser
la renaissance après la mort. Ou comment se tourner vers l’avenir après
un drame sans précédent. Et en contemplant le lieu, nul doute que le
poumon économique de New York n’est pas mort, bien au contraire.
Une expérience à l’échelle humaine et à l’échelle urbaine
Depuis
le 28e étage de la 7 World Trade Center, qui en compte 52, la vue sur
ce complexe de presque 16 hectares est imprenable. Il abritait jusqu’en
2001 les tours jumelles?; aujourd’hui, seules sont visibles les
empreintes des deux tours effondrées. Au cœur de cet espace meurtri se
trouvent entre autres, pour le moment – les travaux étant toujours en
cours – la tour numéro 1, la numéro 4, la 7, le mémorial du 11-Septembre
ouvert en 2010 entouré d’une forêt de chênes ainsi qu’un musée. « Cela
crée un site très fort, qui marque l’absence de ces tours », raconte
Rami Abou-Khalil. Et l’architecte d’expliquer que les nouveaux
gratte-ciel « ont eu besoin de répondre non seulement au traumatisme,
mais aussi aux nouveaux besoins de sécurité ».
En
effet, comment bâtir sur un lieu où le monde entier a vu en temps réel
des gens sautant dans le vide pour échapper aux flammes qui emportaient
les tours jumelles il y a vingt ans ? « Le mémorial est là pour que tous
s’en souviennent. Parallèlement, reconstruire plus haut signifie
montrer que cette tragédie ne nous a pas défaits. » D’où l’envie de
reconstruire plus fort, plus grand. Ne pas se laisser abattre. La
Freedom Tower dépasse ainsi tout entendement : 305 000 m2 de verre en
extérieur, 241 000 m2 de superficie, une flèche de 124 mètres de
hauteur, soit la plus haute du monde.
Dans ce
gratte-ciel, de nouvelles normes de sécurité ont été mises en place pour
évacuer, que ce soit au niveau des escaliers ou des ascenseurs, mais
aussi au niveau de la base du bâtiment, un carré de 63 mètres de côté,
un peu surélevé par rapport au niveau du sol pour éviter toute attaque à
la voiture-bélier. Le cœur de la tour est également différent des tours
détruites puisque le béton y a été renforcé. Sa base est en métal et en
béton armé. Le One World Trade Center a pour objectif de pouvoir être
évacué en une heure maximum. depuis la tour 7, au
coeur de Manhattan.Une rose est déposée près du nom de la victime le
jour de son anniversaire, ici à New York, le 8 septembre 2021.Les 3 000
noms des victimes des attentats du 11 septembre 2001 gravés sur la
fontaine du mémorial, à Manhattan.Rami Abou Khalil, architecte de SOM,
cabinet bâtisseur de gratte-ciel dans le monde entier.
L’humilité dans la démesure
«
Mais l’endroit le plus important de ce site étant le mémorial, le One
World Trade Center est architecturalement très humble », tempère Rami
Abou-Khalil. En effet, la forme de la tour peut sembler simple, mais
très iconique, « pour qu’un enfant puisse la dessiner s’il la voit ». «
Et avec le temps, grâce à sa simplicité, les New-Yorkais aiment de plus
en plus ce lieu. »
Aujourd’hui les habitants de
la ville sont en effet de retour sur le site, même si la pandémie de
Covid a éloigné nombre de personnes travaillant dans les bureaux des
tours. Guéri, même si la cicatrice est indélébile, le site du World
Trade Center a repris goût à la vie, et le mémorial semble avoir
catalysé la guérison de ce lieu inédit. Déambuler près des fontaines
inversées sur lesquelles les noms des victimes sont gravés, au cœur de
Manhattan, ressemble à un pèlerinage entre recueillement et joie de
vivre. Des roses sont déposées près des noms des victimes le jour de
leur anniversaire. Un symbole de résilience dans ce « nouveau » lieu,
plus humain que jamais, où cohabitent mémoire et vie.