Tokyo 2021 : le Japon bat les États-Unis et remporte pour la première fois l’or en baseball
Dans un pays où ce sport est particulièrement
populaire, les Japonais ont décroché la médaille d’or en baseball en
dominant en finale les États-Unis. Absente depuis les JO de Pékin, cette
discipline a fait un retour dans la compétition, en compagnie du
softball, réservé aux femmes.
Les
fans de baseball japonais attendaient ce titre depuis si longtemps.
Pour la première fois, l’équipe nippone a remporté le tournoi olympique,
samedi 7 août, en battant les Américains sur le score de 2- 0.
Après
avoir battu leurs rivaux sud-coréens en demi-finale, les Japonais ont
surclassé les États-Unis pour s’offrir ce titre dans un pays où ce sport
est une véritable religion.
Plus
d’un siècle après l’introduction du sport par un professeur d’anglais
venu des États-Unis, le Japon s’est approprié le baseball. Signe de
cette popularité, il a été réintroduit dans le programme des Jeux alors
qu’il avait été retiré depuis deux olympiades. Au pays du soleil levant,
« tous les enfants jouent au baseball », a expliqué à l’AFP Itaru
Kobayashi, ancien joueur des Lotte Marines de Chiba, dans la banlieue de
Tokyo, devenu enseignant à l’Université Oberlin, dans la capitale
nippone. Le sport « a été inventé aux États-Unis, mais nous en sommes
tombés amoureux », ajoute-t-il.
Selon
lui, ce sport convient particulièrement au Japon, car il est « comme un
rituel » et qu’il est caractérisé par « l’uniformité et l’obéissance aux
ordres » : « Travaillez en équipe, soyez soudés par l’équipe. On adore
ça. »Le sport qui inspira Murakami
Même
l’écrivain le plus célèbre du Japon ne manque pas de souligner son
amour pour ce sport. Dans une interview au Telegraph, Haruki Murakami
avait raconté que le baseball était à l’origine de sa vocation. Alors
qu’il regardait un match de la ligue japonaise en 1978, il avait eu une
révélation : « Je me souviens encore de l’exacte sensation. Il semblait
que quelque chose flottait dans le ciel, et que je l’avais attrapé
littéralement de mes mains. Je ne savais pas pourquoi cela avait eu la
chance de me tomber dans les mains. (…) Tout ce que je peux dire, c’est
que ma vie était radicalement et définitivement changée à cet instant. » À
la suite de ce geste, Murakami écrira son premier roman, « Écoute le
chant du vent », qui remportera le prix Gunzo, en 1979.
Le
baseball a d’abord été introduit en tant que sport scolaire en 1872 par
Horace Wilson, enseignant à Tokyo, mais il est devenu populaire grâce à
un match où une équipe lycéenne de la capitale a battu un groupe de
résidents étrangers en 1896.
Cette
victoire a fait la une des journaux du Japon, déclenchant une vague de
passion pour le sport et d’autres rencontres contre des équipes
américaines. « Ces matches avaient une importance symbolique, car les
Japonais étaient derrière (les Américains, NDLR) dans bien des aspects,
comme le commerce et l’industrie », explique Robert Whiting, un expert du
baseball qui a vécu au Japon pendant plusieurs décennies. « Le message
était : ‘si on peut battre les Américains à leur propre jeu, on peut
sûrement les dépasser dans d’autres domaines’ », résume-t-il.
Une
ligue professionnelle se développe dans les années 1930, mais c’est
après la Seconde Guerre mondiale (quand le Japon a été défait par les
États-Unis) que le baseball devient le passe-temps national, le baseball
amateur en particulier étant adulé pour sa « pureté » car n’étant pas mu
par l’argent. Cette flamme est toujours ardente, comme l’a prouvé
récemment la foule de fans et de pom-pom girls rassemblée pour un match
du « Tokyo 6 », ligue regroupant six des principales universités de la
capitale.
Des tensions avec la Corée du Sud
Comme
l’explique le journal Le Monde, la rivalité avec les États-Unis a
aujourd’hui fait place à celle avec la Corée du Sud, médaillée d’or à
Pékin. « Il faut dire que le baseball est le sport numéro un dans les
deux pays. Et, de ce fait, il cristallise, encore plus que le judo, le
football ou le volley-ball (…) les tensions persistantes entre deux
voisins dont les relations, délicates sur les questions mémorielles,
sont au plus bas depuis l’élection, en 2017, du président sud-coréen,
Moon Jae-in », décrit le journaliste Philippe Mesmer.
Ces
crispations entourent la question des dédommagements des Coréens qui
avaient été forcés de travailler pour l’industrie japonaise pendant la
guerre et des « femmes de réconfort » contraintes de se prostituer pour
l’armée nippone. Des tensions ont aussi émergé après « l’inclusion des
rochers Liancourt, un groupement d’îlots appelé Dokdo en Corée et
Takeshima au Japon, sur la carte de présentation du parcours de la
flamme olympique », précise Le Monde. Ces îlots sont occupés par la Corée
mais revendiqués par le Japon.
Dans
ce contexte tendu, la délégation sud-coréenne s’est fait remarquer à
son arrivée à Tokyo, en accrochant aux balcons des appartements qu’elle
occupe au village olympique des banderoles faisant référence à une
guerre du XVIe siècle entre les deux pays. Après les protestations du
Japon, le Comité international olympique a déclaré que ces bannières
allaient à l’encontre de la charte olympique.