Financement des partis : Les recommandations du Dialogue politique
La campagne de levée de fonds de Pastef remet au goût du jour le système de financement des partis politiques. Cette question est l’un des points qui ont été soumis à la Commission politique du Dialogue national que présidait feu Général Mamadou Niang. Le Quotidien a parcouru le document intitulé «Propositions sur le financement public des partis politiques.» En effet, indique le journal, une sous-commission ad hoc, présidée par Cheikh Alioune Ndiaye, avait été créée et ses résultats ont été annexés au Rapport remis au chef de l’Etat et divisé en trois parties : les modalités du financement public, le cadre juridique et la structure de gestion, et l’organe de contrôle du financement.
Le Cadre juridique du financement proposé par la sous-commission du dialogue politique propose, en plus de la Constitution, que la loi sur les partis politiques soit reprise pour «prendre en compte la nouvelle donne que constitue le financement direct». Mais aussi le Code électoral (sur le financement public indirect) et le Code des obligations civiles et commerciales (sur l’obligation, pour les associations, du dépôt de bilans financiers et de l’interdiction du financement étranger).
Le rapport suggère la mise en place d’une «Charte des partis politiques pour la gestion intégrale de la vie et de l’activité des partis». Les commissaires ont retenu le financement direct est «constitué de fonds mis à la disposition du parti, selon des critères d’éligibilité et d’admission préalablement fixés» et le financement indirect «représente les dépenses prises en charge directement par l’Etat au profit des partis politiques à l’occasion des élections». Il s’y ajoute «l’impression des bulletins de vote, l’impression et la mise à disposition des documents de propagande».
Financement privé national et personnes morales, mais avec plafonnement
Pour le financement privé national, il s’agit pour le parti politique de compter sur ses «ressources propres» comme les cotisations des adhérents et des élus, les dons et legs des personnes physiques, mais avec un «plafonnement du montant par an et par personne à déterminer». Les commissaires ont également proposé de retenir l’«interdiction formelle du financement par des personnes morales», mais «en l’encadrant par le plafonnement».
Financement étranger: De la saisie du montant délictuel à la dissolution
Vient alors cette question qui vaut à Pastef les menaces de dissolution par le ministre de l’Intérieur. «Ce mode de financement est strictement interdit. De lourdes sanctions doivent être envisagées pour tout parti politique coupable», lit-on dans le document qui énumère les sanctions à envisager que sont «la saisie du montant délictuel, l’exclusion du financement direct pour une durée déterminée, l’inéligibilité du responsable du parti, le retrait du récépissé de reconnaissance du parti». Et puis, «en cas de dissolution du parti, avant ou en cours d’exercice, l’intégralité du financement perçu ou le reliquat est sans délai reversé au Trésor public».
Structure de gestion : La Cena avec des pouvoirs élargis
Les
partis politiques ne devant pas être «juge et partie» et l’Organisme de
gestion des élections (Oge) «intervenant et gérant un processus à
l’issue duquel les critères d’éligibilité et d’admission au financement
public direct sont fixés», la sous-commission a suggéré que le
financement des partis politiques soit géré par une structure
indépendante et un organe de contrôle. Sur ce point, les commissaires
proposent l’élargissement des pouvoirs de la Commission électorale
nationale autonome (Cena), «la seule structure, à équidistance des
acteurs, susceptible de prendre en charge cette question avec
efficience», pour y ajouter «la gestion des règles et modalités du
financement public direct». Pour ce faire, il conviendrait d’ajouter à
ses missions de contrôle et de supervision celle de «gestion des
mécanismes du financement public direct». La Cena sera donc compétente
pour «examiner les critères généraux d’éligibilité et d’admission au
financement, recevoir et d’assurer le suivi et le contrôle du programme
de l’animation politique, de la formation civique et citoyenne, en usant
de tous les moyens appropriés pour garantir le déroulement efficient de
sa mission, préparer et de présenter, en relation avec l’organe de
contrôle, le décret portant répartition du financement direct, réclamer
auprès des partis politiques tous documents ou pièces susceptibles
d’aider au bon déroulement de sa mission».
Organe de contrôle : La Cour des comptes
De
même, les commissaires ont trouvé qu’il ne peut y avoir meilleur
contrôleur du financement des partis politiques que la Cour des comptes,
un organe déjà «existant» et «compétent en la matière». Il reviendra à
la juridiction de «recevoir l’inventaire annuel du patrimoine du parti
politique, recevoir, comme unique destinataire, les comptes annuels du
parti politique, participer, en relation avec la structure de gestion, à
l’élaboration du décret portant répartition du financement».
Des critères de financement des partis politiques très contraignants
La
Sous-commission chargée du financement des partis politiques légalement
constitués s’est intéressée à l’origine et au plafonnement des fonds.
Si elle n’a pas déterminé un taux pour les recettes internes, Le
Quotidien a appris qu’il a été question, dans les discussions, de 0,8% à
1% à prélever sur le budget de l’Etat. Et le financement se fera à
l’issue des élections législatives, mais aussi départementales et
municipales. Le débat sur les critères généraux d’éligibilité des partis
politiques au financement public a été souvent posé. La sous-commission
a proposé les critères suivants qui sont cumulatifs : «Etre un parti
politique légalement constitué, avoir un siège national exclusivement
destiné aux activités du parti (distinct d’un domicile ou d’un bureau),
ouvrir un compte au nom du parti, ouvert dans les livres d’un
établissement financier installé au Sénégal, produire la preuve de la
tenue régulière des instances statutaires du parti, participer aux
élections législatives ou territoriales, tenir un inventaire annuel des
biens meubles et immeubles annexés aux comptes financiers à déposer au
plus tard le 31 mars de chaque année auprès de l’organe de contrôle.» Et
tout parti ayant produit du faux va «perdre le droit au financement
public direct pour une durée de deux (2) ans, sans préjudice de
poursuites judiciaires». Tout comme les critères d’admission au
financement, ceux de représentativité des partis politiques restent
aussi rigoureuses. Le Rapport remis au chef de l’Etat propose que pour
participer aux élections législatives, un parti doit avoir «un élu et
bénéficier de 0,5% des suffrages valablement exprimés». Pour être admis
aux élections départementales et municipales, un parti doit «totaliser
0,25% de conseillers élus sur l’ensemble des élus territoriaux sur le
territoire national».