En Guinée, le bilan des violences post-électorales s’alourdit et la médiation piétine
Au
moins 21 personnes sont mortes dans des violences consécutives à la
présidentielle du 18 octobre en Guinée. La victoire du président sortant
Alpha Condé est toujours contestée par l’opposition qui assure « ne pas
attendre grand chose » d’une médiation internationale en cours.
Le
bilan des violences qui ont éclaté en Guinée au lendemain de la
présidentielle du 18 octobre s’est officiellement alourdi, lundi 26
octobre. « Le gouvernement guinéen a indiqué que 21 personnes ont été
tuées depuis lundi (19 octobre) dans les violences post-électorales,
dont des agents des forces de l’ordre », a déclaré le présentateur du
journal de 20 h 30 de la télévision nationale RTG. L’opposition évoque
de son côté au moins 27 morts.
Le
gouvernement guinéen a indiqué que plus de 240 personnes avaient été
interpellées à travers le pays depuis huit jours. « Nous en sommes à 243
cas d’interpellations pour infractions diverses. Ce ne sont pas de
simples délits qu’ils commettent, mais des cas avérés de scènes
criminelles savamment et préalablement programmées pour ternir l’image
de marque des institutions de l’État », a déclaré le ministre de la
Justice, Mory Doumbouya.
L’atmosphère
est restée tendue lundi à Conakry, même si l’appel à manifester contre
un troisième mandat d’Alpha Condé lancé par le Front national pour la
défense de la Constitution (FNDC) n’a été que peu ou pas suivi, de
nombreux habitants disant craindre pour leur sécurité.
Médiation
Les
émissaires de l’ONU, de l’Union africaine (UA) et de la Communauté des
États de l’Afrique de l’ouest (Cédéao) arrivés dimanche ont poursuivi
leurs efforts de médiation en rencontrant plusieurs ministres, la
commission électorale et le corps diplomatique. Ils se sont également
rendus en fin de journée au domicile du chef de l’opposition, Cellou
Dalein Diallo, qui s’est autoproclamé victorieux dès le lendemain du
scrutin. Une conférence de presse de la délégation prévue lundi soir a
été reportée à mardi matin.
« Je
n’attends pas grand chose de ces émissaires (…) qui, en réalité, se
sont toujours rangés du côté d’Alpha Condé. Mais il est important de
saisir toutes les opportunités pour communiquer les informations qui
mettent en évidence notre victoire et pour attirer l’attention sur la
répression sanglante qui est en train de s’abattre sur les Guinéens », a
tweeté peu après la rencontre Cellou Dalein Diallo. « Continuons notre
mobilisation dans les rues et sur les places publiques pour exiger le
respect de la vérité des urnes. PAS DE RECUL ! », a-t-il ajouté.
Cellou Dalein Diallo a ensuite dénoncé le « kidnapping » par les forces de
l’ordre de deux vice-présidents de son parti, l’UFDG, Fodé Oussou
Fofana et Kalemodou Yansané, au sortir de la réunion avec la mission de
médiation.
Cellou
Dalein Diallo, est crédité de 33,5 % des votes, selon les résultats
provisoires annoncés samedi par la commission électorale (Céni), contre
59,5 % pour le président sortant Alpha Condé. Le chef de l’opposition a
confirmé lundi son intention d’introduire un recours contre ces
résultats, entachés selon lui de fraudes massives, devant la Cour
constitutionnelle, sans se bercer d’illusions.
La banlieue panse ses plaies
À
Conakry, la plupart des boutiques sont restées fermées lundi le long de
l’autoroute Fidel Castro, qui mène du centre-ville à l’aéroport à
travers des quartiers réputés favorables au pouvoir. Plus au nord, dans
la grande banlieue où domine l’opposition, des policiers, gendarmes et
militaires étaient présents en force, comme depuis plusieurs jours. Des
tirs ont été notamment entendus dans des quartiers comme Cosa et
Sonfonia, sans que l’on sache s’ils ont fait des morts ou des blessés.
Wanindara,
l’un des fiefs de l’opposition, portait encore les stigmates des
affrontements des derniers jours : carcasses de deux camions brûlés,
pneus incendiés, pierres jonchant le sol et bâtiments pillés.
Selon
Amnesty International, les forces de sécurité ont fait depuis une
semaine un usage excessif de la force, tirant à balles réelles contre
des manifestants. L’ONG a aussi condamné les coupures d’Internet, dont
l’accès était toujours très difficile lundi.