Pots-de-vin, vol de deniers, achat de son manoir… Le dossier accablant des Usa contre Jammeh
Yaya Jammeh est allé se réfugier en Guinée Équatoriale depuis qu’il a été déchu du pouvoir. Mais, les Usa ne l’oublient pas. Le parquet du District de Maryland a dressé un dossier où son système d’enrichissement, axé sur les pots de vin et d’extorsion de fonds a été dévoilé.
Transactions dissimulées dans le compte de sa fille
Dans son document épluché par iGfm, le parquet du District de
Maryland n’accable pas que de Jammeh. Zineb. Son épouse «a été impliquée
dans le vol et le détournement de fonds publics utilisés pour soutenir
son style de vie luxueux», indiquent les magistrats. En effet, la
famille utilisait plusieurs comptes bancaires privés pour faire
transiter l’argent. Parmi eux, le compte Mariam Yahya Jammeh Family
Trust ou «Myj family Trust», logé à Trust Bank Limited en Gambie. Jammeh
et son épouse ont prétendu qu’il s’agit du compte bancaire de leur
fille. Et c’est Zineb, son épouse, qui a créé ledit compte en septembre
2009.
Puis, celui que les américains ont surnommé «L’homme d’affaires n°1»
est entré en jeu. Celui-ci détenait une société d’importation de
produits pétroliers. Il avait versé ou facilité le versement de
«pots-de-vin, directement à Jammeh, pour un total de plus de 9 000 000
de dollars». En effet, renseignent les américains, Jammeh lui avait
accordé des droits de monopole sur les importations de produits
pétroliers en Gambie. Et lui aussi, a introduit un «second homme
d’affaires» auprès du dictateur déchu. Ce dernier, fournissait les
services de téléphonie et d’internet après avoir acheté des actions de
l’État.
281 propriétés, 100 comptes bancaires…
Les américains, qui ont épluché le passé de Jammeh, renseignent que
l’ex président était un simple lieutenant dans l’armée gambienne où il
touchait un salaire minimal. Devenu président, le salaire mensuel
officiel de Jammeh est passé à 911 Usd par mois en janvier 2006, 1492
dollars par mois en janvier 2007 et 3295 dollars par mois de janvier
2008 à décembre 2014. Mais, révèlent les américains, durant son mandat,
Jammeh a accumulé au moins 281 propriétés foncières connues et
enregistrées à son nom, ou à travers ses sociétés et fondations. Il
détient des actions ou intérêts et utilise plus de 100 comptes bancaires
privés directement ou par l’intermédiaire des sociétés ou fondations.
Et pourtant, relèvent le parquet de Maryland, «ni Jammeh ni son
épouse Zineb ne semblent avoir de patrimoine familial pour expliquer
comment il a acquis ces actifs.» La question qui se pose donc, c’est
comment Jammeh a pu collecter une telle richesse ? Les américains
renseignent que l’ex président avait déployé un système de
corruption extrêmement sophistiqué, qui «consistait à solliciter et à
extorquer des pots-de-vin à des entreprises opérant en Gambie et à faire
retirer des fonds en espèces de la Banque centrale de Gambie.»
Système d’extorsion basé sur des menaces
«Par exemple, Jammeh a accordé des droits de monopole aux entreprises
sur des secteurs lucratifs de l’économie gambienne comme sur
l’importation de carburant et les télécoms en échange de pots-de-vin.
Jammeh menaçait périodiquement et à plusieurs reprises d’annuler ces
droits à leurs bénéficiaires à moins que ces entreprises ne lui versent
d’autres pots-de-vin.» Et c’est ce qui s’est passé avec la société
d’importation de produits pétroliers de l’homme d’affaires n°1. En
juillet 2010, ce dernier a été informé que son monopole sur les
importations de carburant en Gambie cesserait à la fin de 2010. Il a
demandé à Jammeh d’émette une lettre confirmant le maintien de son
monopole jusqu’en 2014.
Puis, le 10 août 2010, la société pétrolière a transféré l’équivalent
de 1000 000 de dollars dans le compte des Jammeh. «Le même jour, le 10
août 2010, l’homme d’affaires n°1 a reçu une lettre de Mustapha Yarbo,
un responsable gambien faisant partie du personnel présidentiel de
Jammeh, confirmant le maintien des droits de monopole», renseigne le
parquet de maryland. Et 2011, Jammeh a également reçu des paiements de
la part de la société de télécommunication de l’homme d’affaires
numéro2. Car, après une brouille, Jammeh avait mis en veilleuse les
activités de ce dernier. Mais, en 2011, il a accepté d’autoriser l’homme
d’affaires n°2 à reprendre ses activités, conformément à un nouveau
contrat.
Fonds publics pour son utilisation personnelle
«Et le cabinet de Jammeh avait donné des instructions pour le
versement «de toutes les sommes dues à l’avenir au gouvernement gambien
sur un nouveau compte bancaire ouvert à la Banque centrale (…) Les
relevés bancaires montrent que 5 026 805 de dollars ont été déposés sur
ce compte. Jammeh a ensuite procédé à dépenser ces fonds pour son
utilisation personnelle.» Entre juin 2011 et janvier 2013, la société
pétrolière et ses dirigeants ont payé ou facilité le paiement de plus de
7 514 000 millions de dollars sous forme de pots-de-vin à Jammeh»,
renseigne le document.
Et pour acheter son manoir sis à Maryland, aux Usa, ce sont ce genre
de procédés que Jammeh a mis en branle. En effet, raconte le parquet
américain, un jour après que la société pétrolière eut reçu une
réaffirmation de ses droits de monopole d’importation de carburant, un
employé de la société a transféré 1 000 000 de dollars dans le compte
Myj chez Trust Bank Ltd. Puis, vers le 18 août 2010, ce million de
dollar, a été transféré du compte Myj Family Trust vers celui de la
société immobilière sis à Maryland.
Au total, les opérations visant à financer l’achat de la propriété
comprenaient global de d’environ 3 562 610 dollars. Et le 20 septembre
2010, la propriété a été achetée pour 3 500 000 de dollars, plus 62 610
dollars en frais de dossier.
Les américains, ont actuellement déclenché une action judiciaire pour la confiscation de tous les droits, titres et intérêts sur ce bien. «Les biens du défendeur ont été acquis avec le produit de pots-de-vin illicites et de fonds publics volés détournés par l’ancien président de la Gambie, YAHYA», précisent-ils.