Bassirou Diomaye Faye : «Le droit de grève ne doit pas être un prétexte pour compromettre la liberté de travail »
Le
chef de l’État, Bassirou Diomaye Diakhar Faye, a présidé, ce jeudi, la
cérémonie solennelle de rentrée des Cours et Tribunaux à la Cour
suprême, sur le thème «Droit de grève et préservation de l’ordre
public».
D’emblée,
il a déclaré que le droit de grève, composante essentielle de la
liberté syndicale, est fondamental, parce que consacré tant au plan
national qu’au niveau international. Il rappelle qu’il est garanti par
la Constitution et réaffirmé par les normes internationales telles que
les conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT).
Il
s’agit, énumère-t-il, essentiellement de la Convention n°87 sur la
liberté syndicale et la protection du droit syndical de 1948 ainsi que
de la Convention n°98 sur le droit d’organisation et de négociation
collective de 1949. « Le droit de grève est ainsi reconnu par notre
Constitution, en son article 25, qui précise cependant qu’il doit
s’exercer, je cite, ‘dans le cadre des lois qui le régissent’. Ce droit
peut être présenté comme l’expression la plus aboutie de notre
engagement pour les droits fondamentaux des travailleurs. Il ne s’exerce
pas dans l’anarchie, pour autant qu’il doit s’affirmer dans le respect
des conditions posées par le constituant à l’article 25 de notre loi
fondamentale, à savoir ne pas porter atteinte à la liberté de travail ni
mettre en péril l’entreprise ou les services publics essentiels ».
Pour
le chef de l’État, cela signifie que le droit de grève doit
s’accommoder, dans sa mise en œuvre, du respect de l’ordre public. « Il
est donc aménagé pour assurer la préservation de la sécurité publique,
de la salubrité, de la santé ou encore de la tranquillité publique.
Composante essentielle de notre démocratie, le droit de grève donne voie
aux revendications légitimes des travailleurs », dit-il.
Cependant,
insiste-t-il, «il ne doit pas être un prétexte pour compromettre la
liberté de travail et la continuité du service public. Il y a un
équilibre à rechercher et à promouvoir entre, d’une part, l’intérêt
général et les intérêts particuliers des professionnels, d’autre part.
Il en résulte que son exercice s’effectue dans le respect des droits
collectifs, notamment dans des secteurs cruciaux tels que la santé,
l’éducation et la sécurité publique ».
Dans
ce sens, poursuit le président Faye, le Code du travail et le Statut
général de la Fonction publique ont prévu les conditions requises pour
un exercice licite du droit de grève. « La loi n°61.33 du 15 juin 1961
portant statut général des fonctionnaires prévoit, en effet, des
obligations telles que le préavis et le respect des services minimums
qui garantissent la continuité des fonctions vitales de l’État. Le
respect du bon ordre justifiera ainsi des réquisitions qui sont une
limite importante, mais nécessaire au droit de grève », a-t-il avancé.
«J’encourage, en conséquence, les inspecteurs du travail et de la sécurité sociale et les magistrats compétents à promouvoir… »
Le
président de la République fait savoir qu’encadré par des textes tels
que l’article L276 du Code du travail, ces mesures administratives
permettent d’assurer la continuité des services publics essentiels dans
des circonstances exceptionnelles. « Ces secteurs incluent non seulement
les services publics administratifs, mais aussi des entreprises à
vocation d’intérêt public comme celles fournissant l’eau, l’électricité
ou les transports en commun. Toutefois, il est essentiel que les
réquisitions soient prises avec discernement et appliquées avec rigueur.
Elles doivent respecter le principe fondamental de la proportionnalité,
dans le but de préserver l’intérêt général sans compromettre la liberté
syndicale ou vider le droit de grève de sa substance », soutient-il.
Tout en ajoutant que ces mesures, bien que nécessaires dans certains
cas, doivent toujours être prises avec le souci de maintenir un
équilibre entre la protection des droits individuels et la préservation
des intérêts vitaux.
Car
la justice sénégalaise a, à plusieurs reprises, dans sa jurisprudence,
affirmé que le droit de grève doit être concilié avec la préservation de
l’intérêt général.
Selon
Diomaye Faye, les acteurs ne doivent donc pas perdre de vue que, dans
l’esprit de la loi, le préavis a pour objectif noble d’asseoir un cadre
de concertation dans le but ultime d’éviter l’arrêt brutal et concerté
du travail. « J’encourage, en conséquence, les inspecteurs du travail et
de la sécurité sociale et les magistrats compétents à promouvoir la
conciliation, qui est un levier important du dialogue social, car
l’ordre public dépasse les seules prérogatives de l’État. Il est un bien
commun reposant sur la sécurité, la tranquillité, la salubrité et le
respect des libertés », a-t-il affirmé.