Présidentielle en Mauritanie: le sortant Ghazouani en tête, le principal opposant conteste
Le président mauritanien sortant El Ghazouani est largement en tête de l’élection présidentielle de samedi, son principal opposant ayant déjà fait savoir qu’il ne reconnaîtra pas les résultats du scrutin qui seront proclamés officiellement lundi.
Mohamed
Ould Cheikh El Ghazouani, un militaire de carrière de 67 ans, détient
56,12% des voix après 100% du dépouillement, selon la plateforme en
ligne de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) qui a
publié bureau par bureau les résultats du scrutin.
Le
principal opposant, le militant anti-esclavagiste Biram Dah Abeid, 59
ans, arrivé deuxième avec 22,10% des voix, a déclaré dimanche au cours
d’une conférence de presse qu’il ne reconnaîtrait pas les résultats de
« la Ceni de Ghazouani », qu’il accuse d’être instrumentalisée par le
pouvoir.
« Nous
ne reconnaîtrons que nos propres résultats et sur cette base, nous
descendrons dans la rue pour refuser le hold-up électoral », a-t-il
martelé.
Il
a affirmé que leur mouvement de refus « sera pacifique » et a appelé
l’armée et les forces de l’ordre à « ne pas suivre les ordres du régime ».
Certains
de ses partisans ont manifesté en début de soirée dans certains
quartiers de la capitale Nouakchott, brûlant des pneus et des poubelles
et perturbant la circulation.
En
fin d’après-midi, le siège de campagne du candidat était encerclé par
les forces de sécurité, a constaté un journaliste de l’AFP. Son
directeur de campagne a été arrêté, selon son porte-parole.
La présence policière s’est fortement accrue dans la capitale en fin de soirée.
– « Sous contrôle » –« La
situation dans le pays est sous contrôle et les citoyens peuvent vaquer
tranquillement à leurs occupations », a déclaré à la presse le ministre
de l’Intérieur Mohamed Ahmed Ould Mohamed Lemine.
Le
ministère « réaffirme ici qu’il ne tolérera aucun agissement de nature à
perturber la quiétude et la tranquillité des citoyens et des résidents
installés chez nous » a-t-il ajouté.
Selon
les résultats de la Ceni, le candidat islamiste de Tawassoul, premier
parti d’opposition à l’Assemblée nationale, Hamadi Ould Sidi El Mokhtar,
se classe troisième avec 12,76% des suffrages.
Il
avait déclaré samedi « rester attentif à tout manquement » tout en
appelant ses militants à s’éloigner de tout ce qui peut créer le
désordre et perturber la tranquillité des gens.
La
Ceni a jusqu’à lundi soir pour prononcer les résultats provisoires
officiels. M. Ghazouani a déclaré dans la nuit de samedi à dimanche que
« seule la Ceni est en droit de publier (les résultats) et nous devons
l’attendre ».
Le Conseil constitutionnel devra proclamer ensuite les résultats définitifs.
Le taux de participation se situe à 55,39%, selon la Ceni.
Au
cours de la campagne électorale, M. Ghazouani s’est présenté comme le
garant de la stabilité de la Mauritanie qui n’a plus connu d’attaque
jihadiste sur son sol depuis 2011 alors qu’elles abondent au Mali voisin
et ailleurs au Sahel.
Il
a fait de l’aide aux plus démunis et à la jeunesse un de ses chantiers
prioritaires. En Mauritanie, les moins de 35 ans, qui représentent plus
de 70% de la population, partent de plus en plus vers l’Europe ou les
Etats-Unis, poussés par l’espoir d’une vie meilleure.
– « Veiller aux intérêts des populations » –Après
un premier mandat entravé par l’épidémie de Covid-19 et les
conséquences de la guerre en Ukraine, M. Ghazouani espère réformer
davantage au cours d’un second mandat de cinq ans grâce à des
perspectives économiques favorables, et notamment le lancement de la
production de gaz au second semestre 2024.
Face
à lui, six candidats ont promis la première véritable alternance
démocratique dans ce vaste pays désertique d’environ 4,9 millions
d’habitants qui a connu une multitude de coups d’Etat de 1978 à 2008,
avant de vivre en 2019 sa première transition entre deux présidents
élus.
Aucun incident majeur n’a été signalé dans le pays au cours du scrutin présidentiel, selon les observateurs.
« D’après
les premiers résultats, (le président) Ghazouani et (l’opposant) Biram
se distinguent. Nous demandons à celui qui sera élu de veiller aux
intérêts des populations, notamment en matière de sécurité », a déclaré à
l’AFP Mohamed Awa, un commerçant à Nouakchott.
« Je
pense que l’élection s’est bien déroulée. Toutefois la moitié du peuple
met en doute les résultats eu égard au déroulement de la campagne
électorale. Certains disent qu’elle manquait de transparence.
Personnellement,je n’ai rien remarqué qui pourrait susciter
l’inquiétude », a estimé de son côté Ahmedou Seyed, un étudiant.
Le
gouvernement a mis en place un Observatoire national chargé de
surveiller l’élection, que l’opposition a dénoncé comme un instrument de
manipulation du scrutin.