Majorité écrasante à l’ONU pour un « cessez-le-feu humanitaire » à Gaza
Prenant le relais du
Conseil de sécurité paralysé, l’Assemblée générale de l’ONU a réclamé
mardi « un cessez-le-feu humanitaire immédiat » à Gaza, un texte non
contraignant qui vise toutefois par sa majorité écrasante à mettre la
pression sur Israël et son allié américain.
« Le
message puissant de l’Assemblée générale représente un jour
historique », a salué l’ambassadeur palestinien à l’ONU Riyad Mansour.
« C’est notre devoir collectif de poursuivre sur ce chemin jusqu’à ce que
nous puissions voir la fin de cette agression contre notre peuple.
La
résolution adoptée par 153 voix pour, 10 contre (dont Israël et les
Etats-Unis), et 23 abstentions sur 193 Etats membres, a engrangé plus de
soutien que celle d’octobre (120 pour, 14 contre, 45 abstentions) qui
appelait à une « trêve humanitaire immédiate, durable et soutenue, menant
à la cessation des hostilités ».
Cette
large majorité a même dépassé le soutien à la condamnation de
l’invasion russe de l’Ukraine. Ces votes de l’Assemblée avaient
rassemblé au mieux 143 voix, un résultat que les Etats-Unis avait alors
vu comme une preuve de l’isolement de la Russie.
« L’ampleur
de la majorité va vraiment faire mal pour les Etats-Unis », a commenté
auprès de l’AFP mardi Richard Gowan, de l’International Crisis Group.
« Cela montre que la grande majorité des Etats membres de l’ONU ont perdu
patience face à la position de Washington ».
La
résolution, répondant à une demande sans précédent du secrétaire
général de l’ONU Antonio Guterres qui craint un « effondrement total de
l’ordre public » dans le territoire palestinien en guerre, « exige un
cessez-le-feu humanitaire immédiat », réclame la protection des civils,
l’accès humanitaire et la libération « immédiate et inconditionnelle » de
tous les otages.
Comme le précédent texte adopté fin octobre, il ne condamne pas le Hamas, au grand dam des Etats-Unis et d’Israël notamment.
« Pourquoi
est-ce si difficile de dire sans équivoque que tuer des bébés et
abattre des parents devant leurs enfants est horrible? », a lancé
l’ambassadrice américaine Linda Thomas-Greenfield.
Son
homologue israélien Gilad Erdan a lui dénoncé avant le vote une
résolution « hypocrite ». « Le temps est venu de rejeter la faute sur ceux
qui le méritent, les monstres du Hamas », a-t-il insisté, estimant qu’un
cessez-le-feu ne ferait que renforcer le mouvement islamiste.
– « Deux poids, deux mesures » -L’amendement
américain qui voulait condamner « les attaques terroristes abominables
du Hamas » du 7 octobre a été rejeté (84 voix pour, 62 contre, 25
abstentions), comme un amendement similaire fin octobre.
Cette
réunion spéciale de l’Assemblée générale a été réclamée par les pays
arabes après le véto américain vendredi à un projet de résolution du
Conseil de sécurité réclamant ce même « cessez-le-feu humanitaire
immédiat ».
De
nombreux pays et organisations de défense des droits humains avaient
déploré cet échec, y compris Antonio Guterres décrivant un Conseil de
sécurité à l’autorité et la crédibilité « compromises ».
Le
Conseil avait déjà mis plus d’un mois après le début de la guerre entre
Israël et le Hamas pour réussir à parler d’une seule voix, se
contentant mi-novembre, après quatre textes rejetés, de demander des
« pauses » humanitaires.
Plus
de deux mois après l’attaque sanglante et sans précédent perpétrée par
le Hamas sur le sol israélien le 7 octobre –qui a fait 1.200 morts
selon les autorités–, Israël accentue son offensive dans la bande de
Gaza, contrôlée par le mouvement palestinien.
L’ONU
ne cesse d’alerter sur la situation catastrophique à Gaza, où le
système humanitaire est « au point de rupture » et où plus de 18.000
personnes ont été tuées selon le ministère de la Santé du Hamas.
« Qu’attendons-nous
pour arrêter ces morts et cette machine de guerre destructrice ? », a
lancé mardi à la tribune l’ambassadeur égyptien Osama Mahmoud
Abdelkhalek Mahmoud, au nom du groupe arabe, déplorant les « efforts
d’une minorité de pays qui s’opposent à l’opinion publique
internationale en faveur d’un cessez-le-feu ».
Dans
une allusion à peine voilée aux Etats-Unis, il a dénoncé les pays qui
appliquent une politique de « deux poids, deux mesures ».
« Le
prix d’une défaite du Hamas ne peut pas être la souffrance continue de
tous les civils palestiniens », ont déclaré de leur côté dans un
communiqué commun les Premiers ministres d’Australie, du Canada et de la
Nouvelle-Zélande, dont les pays ont voté pour la résolution.