Coronavirus : Sale temps chez les mendiants
Ils passaient la journée aux alentours
des mosquées à la quête de l’aumône venant des fidèles. Aujourd’hui,
ils sont en train de subir les conséquences de la fermeture des mosquées
décidée par le gouvernement, afin de réduire la propagation du
coronavirus. En effet, raconte Sud Quotidien dans sa livraison de ce
mercredi, les fidèles se font rares dans ces lieux de culte. Ce qui fait
que les mendiants reçoivent de moins en moins d’aumône. Un tour à la
grande mosquée de Grand-Dakar hier, mardi 23 mars, a permis de faire le
constat.
Assise
sur une brique, devant la grande mosquée du quartier Grand-Dakar, la
mine triste, Fatou Sy n’en revenait pas lorsque nous nous sommes
approchés d’elle, espérant recevoir quelque chose. Un petit sourire
illumine son visage et elle dit : « Vous nous donnez, nous allons nous
partager » (l’aumône reçue). Mais la surprise a été grande lorsque nous
nous sommes présentés comme journaliste et avons commencé à lui poser
des questions. La mère de famille enfilée dans son « meulfeu » dit quitter
les Parcelles Assainies tous les jours pour élire domicile devant la
grande mosquée de Grand-Dakar afin de « chercher de quoi nourrir sa
famille ».
Mais,
depuis que le gouvernement a décidé de de l’interdiction des
rassemblements, entrainant la fermeture des mosquées jusqu’à nouvel
ordre, pour endiguer la propagation du coronavirus (Covid-19), Fatou Sy
n’arrive presque plus à recevoir de l’aumône. « Les bienfaiteurs venaient
prier ici et ils nous donnaient de l’aumône ; mais maintenant on ne
voit presque plus de gens, avec la fermeture des mosquées », confie Fatou
Sy. Pis, dit-elle, « je suis là depuis ce matin, mais depuis que je suis
assise ici, personne n’est venue me donner même 25 francs. Vraiment,
les gens se font rares depuis que la mosquée est fermée », dit-elle, avec
un air triste. Et de relever : « depuis quelques jours, je suis obligée
de marcher pour rentrer chez moi parce que je n’arrive pas à avoir de
quoi prendre une voiture », laisse entendre Fatou Sy.
Prenant
tranquillement son café, une autre dame n’est pas mieux lotie que sa
voisine. « Je subis, moi aussi, les conséquences de la fermeture des
mosquées. Là, tout est au ralenti », explique-t-elle. A quelques
encablures, on retrouve Binetou. Bien installée sur sa chaise roulante,
la dame qui vit avec un handicap n’a encore rien reçu depuis le matin.
« Je suis là assise ; personne ne vient me donner de l’aumône. Or, je
subvenais à mes besoins et nourrissait ma famille grâce à cette (aumône)
qu’on me donnait. Vraiment, notre situation est précaire », raconte la
dame. Allant plus loin, elle interpelle le gouvernement. « L’État doit
nous venir en aide ».
Mouhamadou,
un sexagénaire d’origine guinéenne trouvé sur place, semble
relativiser. « Je ne subis pas tellement les conséquences de la fermeture
des mosquées, je continue à recevoir de l’aumône », confie-t-il. Arrivé à
Dakar, il y a un mois, Mouhamadou dira : « même si les gens se font
rares, il y a toujours des personnes qui viennent spécialement pour nous
donner de l’aumône. Tout à l’heure même, c’est un homme qui m’a donné
ces paquets de sucre alors que la mosquée est fermée ». Ce qui fait que
force est de constater que les effets du Covid-19 n’épargne presque
qu’aucun secteur.