Soudan : près de 200 personnes évacuées par la France ont atterri à Djibouti
Une semaine après le début des combats au Soudan, près de 200 ressortissants français et d’autres nationalités évacués du Soudan ont atterri à Djibouti dimanche, a annoncé le ministère français des Affaires étrangères. Les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Italie, l’Allemagne et plusieurs autres pays ont également commencé à évacuer leurs ressortissants ou leur personnel diplomatique.
Les
opérations d’évacuation au Soudan continuent. Près de 200
ressortissants français et d’autres nationalités évacués du Soudan par
la France ont atterri à Djibouti, dimanche 23 avril.
Selon une
source aéroportuaire djiboutienne, 106 personnes ont atterri en fin
d’après-midi à Djibouti. Un deuxième avion avait « une centaine de
personnes à son bord », « des ressortissants français mais également de
nationalités tierces, notamment européennes » et a également atterri à
Djibouti, a déclaré un porte-parole du Quai d’Orsay à l’AFP.
Quelque
150 militaires sont mobilisés, « des éléments de protection, d’autres de
reconnaissance, de soutien logistique et des personnels médicaux », dans
une « situation volatile », où les deux camps « continuent de faire la
guerre, même pendant les trêves », selon l’état-major des armées
françaises.
Les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Italie, l’Allemagne
et plusieurs autres pays ont également commencé à évacuer leurs
ressortissants ou leur personnel diplomatique du Soudan. Depuis plus
d’une semaine, les combats meurtriers entre armée et paramilitaires y
ont fait plus de 420 morts.
Des tirs et des explosions ont de
nouveau secoué la capitale et ses banlieues, survolées par des avions de
combat, selon des témoins.
Au moins 420 morts et 3 700 blessés
Le
pape François a appelé au « dialogue » face à la « grave » situation dans
le pays, où, depuis le 15 avril, les deux généraux au pouvoir depuis
leur putsch de 2021 se sont lancés dans une guerre sans merci.
Les
violences, principalement à Khartoum et au Darfour, dans l’ouest, ont
fait selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) plus de 420 morts
et 3 700 blessés. Elles ont déplacé des dizaines de milliers de
personnes vers d’autres États du Soudan, ou vers le Tchad et l’Égypte,
tandis que plusieurs pays se mobilisent pour évacuer leurs
ressortissants.
Le président américain Joe Biden avait annoncé
plus tôt que l’armée avait « mené une opération pour extraire le
personnel du gouvernement américain de Khartoum ».
Un « peu moins
d’une centaine » de personnes ont été évacuées lors d’une opération
héliportée, a précisé un haut responsable du département d’État, John
Bass. Mais pas les autres ressortissants américains, qui seraient
plusieurs centaines au Soudan, dont l’évacuation n’est pas prévue « pour
le moment ».
Londres a également évacué son personnel diplomatique
et leurs familles, a déclaré le Premier ministre britannique, Rishi
Sunak. « Je rends hommage à l’engagement de nos diplomates et à la
bravoure du personnel militaire qui a mené à bien cette opération
difficile », a-t-il tweeté.
De son côté, l’Italie a mené à bien
une opération pour évacuer ses ressortissants. « Tous nos concitoyens qui
avaient demandé à partir ont été évacués », a déclaré la Première
ministre Giorgia Meloni, dans un communiqué. « Avec eux se trouvent aussi
des citoyens étrangers. »
Plus tôt dans la journée, son ministre
des Affaires étrangères Antonio Tajani avait évoqué l’évacuation par
l’armée italienne « d’environ 200 personnes, y compris des ressortissants
suisses et des membres de la nonciature apostolique », l’ambassade du
Saint-Siège au Soudan. Dans un tweet, il a précisé que les personnes
évacuées étaient « en vol pour Djibouti ».
L’armée allemande a
aussi procédé à des évacuations par avion militaire. « Le premier Airbus
A400M est sur le chemin de la Jordanie avec ses 101 évacués », a annoncé
l’armée allemande sur Twitter, précisant que deux autres avions avaient
été dépêchés au Soudan pour participer aux évacuations.
Le gouvernement espagnol a, lui, évacué une centaine de personnes du Soudan vers Djibouti.
Une hausse des violences crainte
À
Khartoum, les cinq millions d’habitants craignent un regain de violence
après le départ des étrangers, dans leur ville privée d’eau courante et
d’électricité, avec des réseaux téléphonique et internet souvent
défaillants.
Les raids aériens de l’armée et les tirs de canon
des paramilitaires ont déjà détruit ou obligé à fermer « 72 % des
hôpitaux » dans les zones de combat, selon le syndicat des médecins.
Dans
les rues, des lampadaires gisent au sol, des magasins incendiés fument
encore. Ici, une banque a été éventrée. Là, malgré tout, un mécanicien
tente de garder son échoppe ouverte au cas où un des très rares passants
aurait besoin de ses services.
Le conflit a éclaté le 15 avril
entre l’armée du général Abdel Fattah al-Burhane, dirigeant de facto du
Soudan, et son adjoint devenu rival, le général Mohamed Hamdane Daglo,
qui commande les très redoutés paramilitaires des Forces de soutien
rapide (FSR).
Les deux généraux avaient pris le pouvoir lors du
coup d’État de 2021, mettant un coup d’arrêt au processus vers une
transition démocratique qui a suivi la chute du dictateur Omar
el-Béchir, en 2019.
Mais ils ont été incapables de s’accorder sur
l’intégration des FSR aux troupes régulières, après des mois de
négociations politiques sous égide internationale.
« Coups de feu » et « odeur de la mort »
Alors
que les deux camps se livrent à une guerre de l’information, il est
impossible de savoir qui contrôle les aéroports du pays et dans quel
état ils se trouvent après avoir été le théâtre de violents combats.
Cette
semaine, l’Aïd el-Fitr, qui marque la fin du ramadan, a eu un goût amer
pour les habitants de Khartoum. On célèbre habituellement cette fête
« avec des pâtisseries et des cadeaux pour les enfants », mais cette
année, ce sont « des coups de feu et l’odeur de la mort », confie l’un
d’eux, Sami al-Nour.
Les conditions de vie sont probablement
pires au Darfour, théâtre déjà d’un terrible conflit dans les années
2000, où personne ne peut se rendre dans l’immédiat. Sur place, un
docteur de Médecins sans frontières (MSF) évoque une « situation
catastrophique ».
Au Soudan, troisième producteur d’or d’Afrique
et pourtant l’un des pays les plus pauvres au monde, les services de
santé sont à genoux depuis des décennies et un tiers des 45 millions
d’habitants souffre de la faim.
L’arrêt des opérations de la
plupart des organisations humanitaires va aggraver la situation. Et le
conflit menace désormais de gagner du terrain au-delà des frontières du
Soudan, selon des experts.
France 24