Burkina: Le Capitaine Traoré va recevoir une délégation de la CEDEAO, ce lundi
Une délégation ouest-africaine est attendue lundi à Ouagadougou, au lendemain de la démission du chef de la junte au pouvoir au Burkina Faso poussé vers la sortie par un jeune capitaine, après deux jours de tensions marquées par des manifestations anti-françaises.
Lundi matin, les rues de la capitale Ouagadougou avaient retrouvé leur calme après des manifestations parfois violentes en partie provoquées par le refus du chef de la junte, le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, d’accepter sa destitution annoncée vendredi par un jeune capitaine de 34 ans, Ibrahim Traoré.
A la suite d’une
médiation de chefs religieux et communautaires, très influents au
Burkina Faso, le colonel Damiba, arrivé au pouvoir par un putsch le 24
janvier, a finalement accepté de démissionner, ce qui a permis de faire
baisser les tensions. Le chef de la junte déchu s’est réfugié à Lomé.
En
échange de sa démission il a demandé que sa propre sécurité, celle de
ses collaborateurs et des militaires qui le soutenaient, soit garantie.
Ces
requêtes ont été acceptées par le capitaine Traoré qui a également
promis de respecter les engagements pris par son prédécesseur à l’égard
de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) sur
l’organisation d’élections et un retour de civils au pouvoir d’ici
juillet 2024.
Ce
retour à l’ordre constitutionnel pourra même se faire « avant cette
date » si les conditions de sécurité le permettent, a déclaré lundi sur
la radio RFI le capitaine Traoré, ajoutant qu’il n’entendait pas
s’éterniser au pouvoir.
« Pourquoi
continuer? », a-t-il affirmé, l’essentiel étant selon lui « le combat »
contre les jihadistes dont les attaques se sont multipliées depuis le
coup d’Etat de janvier, ainsi que « le développement » du Burkina.
Il
a assuré qu’il ne ferait qu’expédier « les affaires courantes » jusqu’à
la désignation d’un nouveau président de transition civil ou militaire
par des « Assises nationales » rassemblant les forces politiques, sociales
et de la société civile, qui devront se réunir « bien avant la fin de
l’année », selon lui.
Une
position qui, si elle est tenue, devrait satisfaire la Cédéao dont la
délégation sera conduite par la ministre bissau-guinéenne des Affaires
étrangères, Suzi Carla Barbosa, dont le pays assure la présidence de
l’organisation, et comprendra notamment l’ancien président nigérien
Mahamadou Issoufou, médiateur pour le Burkina Faso.
– « Un partenaire comme les autres » –A
sujet de la France, dont l’ambassade et l’institut Français à
Ouagadougou, ainsi que celui de la deuxième ville du pays Bobo
Dioulasso, ont été pris à partie samedi et dimanche par des manifestants
pro-Traoré, le capitaine a assuré que Paris « est un partenaire comme
les autres ». Il a condamné les « actes de violence et de vandalisme »
contre les représentations françaises, appelant « au calme et à la
retenue ».
« Je
note que M. Traoré, ces dernières heures, a fait des déclarations
demandant de ne pas s’en prendre aux intérêts français », a déclaré lundi
sur RFI Catherine Colonna, ministre française des Affaires étrangères.
« Elles sont bienvenues, il faut qu’elles soient respectées et que les
tentatives d’intrusion dans notre ambassade cessent », a-t-elle ajouté.
Les
manifestants pro-Traoré ont notamment mis le feu dimanche à des
barrières de protection autour de l’ambassade, arraché des barbelés pour
tenter de s’y introduire et jeté des pierres et autres projectiles sur
les murs. Des soldats français assurant sa protection ont riposté de
l’intérieur par des tirs de gaz lacrymogène pour les disperser.
Outre
ces actes, les manifestants qui réclamaient le départ du colonel Damiba
accusé d’avoir été protégé par la France, ont aussi brandi des drapeaux
russes, réclamant un renforcement de la coopération militaire avec
Moscou.
L’influence russe ne cesse de croître dans plusieurs pays d’Afrique francophone, particulièrement au Mali et en Centrafrique.
Le
Kremlin a souhaité lundi que « la situation au Burkina Faso se normalise
au plus vite, que l’ordre soit totalement assuré dans le pays et qu’on
revienne au plus vite dans le cadre de la légitimité ».
Le
lieutenant-colonel Damiba était arrivé au pouvoir le 24 janvier par un
coup d’Etat ayant renversé le président Roch Marc Christian Kaboré,
accusé d’inefficacité dans la lutte contre les violences jihadistes.
Le nouveau chef de la junte veut à son tour endiguer « la dégradation continue de la situation sécuritaire ».
Depuis
2015, les attaques régulières de mouvements armés affiliés à Al-Qaïda
et au groupe Etat islamique (EI) ont fait des milliers de morts et
provoqué le déplacement de quelque deux millions de personnes.