Le temps des larges consensus.
C’est
connu. C’est dans les moments d’épreuves que les hommes comme les
nations mesurent leur capacité de résilience et de riposte face aux
chocs et tourmentes de la vie. Dans le contexte actuel de pandémie du
covid 19 qui est encore loin d’avoir livré tous ses secrets en termes
d’impact sur la vie des communautés humaines, notre pays est en train de
vivre sa part d’histoire avec ce phénomène bouleversant du siècle et du
millénaire naissant.
Le
Président Macky Sall qui préside aux destinées du Sénégal dans ces
circonstances historiques exceptionnelles a pour sa part posé des actes
de haute portée politique et sociale dont le décryptage pourrait aider à
nourrir un débat de fond sur notre pays et son devenir. Une première
remarque qu’il est intéressant de faire. Des experts reconnus des
politiques de santé publique dans le monde s’interrogent depuis le début
de la pandémie sur ce qui apparaît comme le paradoxe sénégalais réputé
le plus touché dans notre sous-région alors qu’il est loin d’ être plus
exposé à la contamination que les autres pays du continent .
Madame
Anne Marie Moulin , Directrice de recherche au Cnrs ( France ) livre sa
lecture dans un article du quotidien Le Figaro repris par l’
hebdomadaire Français Le Point où elle déclare : » ce n’est pas un
hasard si le premier cas d’ infection en Afrique subsaharienne a été
détecté au Sénégal. C’est un des pays qui bénéficie des meilleures
structures médicales du continent » Ce qui est bien vrai. Les
classements de l’ OMS nous plaçaient longtemps du point de vue des
performances de notre système en 3eme position sur le continent et en
première position en Afrique boire. Autant un tel jugement qui reflète
celui de la communauté scientifique internationale constitue un motif
réel de satisfaction, autant il nous donne une raison supplémentaire
d’assumer avec le maximum de rigueur les responsabilités qui s’y
attachent. Car personne ne peut invoquer le doute pour se laisser aller
au laxisme qui ne peut être que suicidaire dès lors que nous sommes
dotés de toutes les capacités de surveillance épidémiologique, de
dépistage, de test et de prise en charge sanitaire de nos cas
d’infection au virus. Autrement dit, nos acquis dans ce domaine nous
confèrent à la fois des atouts et des responsabilités qu’il convient
sans cesse de rappeler.
C’est
précisément à cette noble mission que les autorités sanitaires et les
personnels de santé se consacrent sans relâche depuis le déclenchement
de l’épidémie avec le soutien aux premiers rangs du chef de l’ Etat et
de toute l’équipe gouvernementale.
La
stratégie nationale de lutte contre l ‘épidémie du coronavirus appelle
non seulement la mise en place d’un dispositif sanitaire de riposte
opérationnel à tous points de vue, ce à quoi les pouvoirs publics sont
en train vaillamment de s ‘atteler, mais elle comporte surtout une
dimension politique et sociale décisive qui appelle de la part des
individus et des communautés des changements radicaux dans les
comportements individuels et collectifs.
C’est
de ce point de vue que l’exercice que le pays a réussi d’un consensus
presque unanime suite aux décisions présidentielles du week- end dernier
mérite d’être appréhendé dans une perspective qui dépasse la gestion
d’une conjoncture pour donner lieu à des initiatives majeures sur la
gouvernance actuelle et future de notre société.
Au
stade où on en est dans l’évolution de la pandémie, les problèmes ne se
posent plus seulement en sujets de santé publique. Ils se posent
désormais en question de sécurité nationale ! C’est en ses nouveaux
termes que le Président Macky Sall s’est exprimé lors du conseil des
ministres de ce mercredi 18 Mars
Le
Président Français Emmanuel Macron n’a pas dit autre chose lors de son
allocution télévisée de la semaine dernière. S’adressant aux Français,
il a déclaré sans ambages son pays en état de guerre contre le covid19.
Depuis lors tous les ménages sont sous tension et en état d’alerte,
chacun s’attachant à assumer sa part de responsabilité à l’échelle où il
se situe, en acceptant de s ‘astreindre à toutes les contraintes et
rigueurs qu’exige la gravité de la situation.
Le
moment est donc venu pour nous d’ en faire autant . Car il n y a pas de
secret pour la victoire dans un combat de quelque nature que ce soit : »
un peuple déterminé’, fort de la confiance qu’ il a en lui-même, ose
tout entreprendre et peut tout réussir » La Chine vient encore une fois
d’en administrer la preuve au monde entier . Le Japon et la Corée du Sud
sont sur ces pas.
Toutes
les vieilles démocraties occidentales sont à la manœuvre pour réussir
autant que les pays d’Asie. La condition première de cette victoire
reste toutefois la rigueur implacable que les dirigeants et les citoyens
s’imposent en matière d’organisation, de discipline et de mise en
cohérence des interventions. En un mot : le civisme ! Nous en avons les
moyens car nous venons de le prouver.
La
période d’attente qui a précédé l’annonce des décisions présidentielles
du samedi 14 Mars a donné lieu dans les milieux intellectuels et les
médias à des débats souvent passionnés sur les décisions attendues des
pouvoirs publics face aux événements de caractère religieux qui étaient
toutes de nature à exposer le pays à une flambée de l’épidémie. On a
fait souvent référence à des pays du monde arabo islamique tels que le
Maroc , l’Arabie saoudite et l’Iran où les dirigeants avaient décidé
d’autorité l’interdiction de tout rassemblement , y compris religieux
dans le cadre de la lutte contre la propagation du coronavirus.
Des
voix s’étaient élevés pour attirer l ‘ attention sur le cadre
institutionnel de tous ces pays cités en exemple caractérisés par
l’unicité du pouvoir entre le temporel et le spirituel. De ce point de
vue, notre pays présente ce que d’aucuns qualifient » d’exception
Sénégalaise » marquée par une longue tradition, depuis l’époque
coloniale,
d’
institutions fortement laïques dans le contexte d’ une société où les
confessions et les confréries occupent une place importante et jouent un
grand rôle dans l’encadrement et l’animation de la vie culturelle,
sociale et spirituelle des citoyens.
C’est
à partir de ce consensus entre décideurs politiques et guides religieux
de toutes obédiences que nous avons bâti un modèle de laïcité positive
inspirée par une volonté fortement partagée d’un vivre ensemble
exemplaire en terme de convivialité et d’œcuménisme. Ce trésor d’une
nation capable en toutes circonstances de préserver jalousement son
unité tout en s’enrichissant de la diversité des singularités qui la
composent a toujours fait de notre pays une référence en Afrique et dans
le monde.
C’est
ce capital précieux que nous venons de démontrer, à travers le
remarquable consensus du week end dernier, qu’ on reste toujours capable
de sauvegarder à chaque fois que les institutions de la république nous
ont appelé à nos devoirs de patriotisme et de citoyenneté . Il est
important de ce point de vue de retenir la belle leçon de responsabilité
donnée par les guides spirituels du pays en décidant de surseoir pour
des besoins de santé publique à la tenue de rassemblements religieux de
la plus haute portée dans la vie de leurs communautés respectives pour
qui sait réellement ce que ces événements y représentent.
C’est
pourquoi il serait tout à fait indiqué que les consultations et
concertations qui ont rendu possible ces consensus fédérateurs sur le
primat de la République et des citoyens soient poursuivis dans le sens
d’une mise à jour du contrat social , socle de l’ unité et de la
cohésion qui font la force des grandes nations.
Et
dans le contexte de notre monde d’ aujourd’hui où le fait religieux
s’exprime de plus en plus sous des formes tout à fait éloignées des
modèles connus chez nous , il y a bien lieu d’ intégrer dans cette mise à
jour tous les nouveaux paramètres de nos sociétés en pleine mutation
dans un environnement international et sous régional des plus agités .
Les
pouvoirs publics ont bien campé le décor ‘ à partir de l’engagement des
dignitaires religieux de toutes confessions, des acteurs politiques de
toutes obédiences, des leaders syndicaux et des mouvements de la société
civile. Il convient de mobiliser autant, dans le même élan, la
communauté scientifique et tous acteurs du système de santé, public et
privé, en somme toutes les composantes de notre nation qui se sont
rendues disponibles pour participer aux premiers rangs à l’effort de
guerre contre la pandémie avec un objectif fondamental unique : la
rupture de la chaîne de transmission ! ! ! Car, ne faisons aucune
illusion à ce sujet.
Aucun
système de santé au monde ne peut vaincre cette pandémie avec de seuls
moyens médicaux. Tous les pays qui en sont arrivés à la maîtrise de la
pandémie l’ont réussi par la détermination des citoyens, à l’échelle
individuelle et collective, à réussir une campagne de promotion de la
santé par la conscience partagée que le Capital Santé est la première
ressource de l’être humain.
Dans
le cas de cette pandémie où l’humanité fait face à un ennemi invisible
qu’on peut porter et propager partout autour de nous avant que les
signes d’infection ne se déclarent, la seule solution qui s’offre est
une solution de rigueur, de vigilance, de discipline par le strict
respect de toutes les recommandations d’une stricte hygiène individuelle
et collective avec tous les changements qui s’y attachent dans nos
comportements de tous les jours. C’est le moment de nous convaincre que
le développement d’un pays est certes l’affaire des dirigeants et de
l’Etat mais aussi et surtout l ‘affaire des peuples et des organisations
populaires C’est cette belle opportunité que nous devons mettre à
profit pour tirer de la conjoncture toutes les possibilités de
renégociation de pactes actualisés de stabilité durable avec les
principaux acteurs de la vie politique, économique, sociale et
culturelle du pays.
Au regard de la dynamique d’entente nationale obtenue à partir de l’appel du samedi 14 Mars , le Président Macky Sall dispose aujourd’hui de tous les atouts pour provoquer , avec le concours de tous , des effets de leviers en vue d’une mobilisation nationale contre la pandémie. C’est à ce prix que non seulement nous mettrons de notre côté toutes nos chances de succès dans cette grande entreprise, mais que cette même dynamique nous conduira plus loin encore dans la réalisation de nos ambitions d’émergence en 2035 …