Éthiopie: pourquoi les combats reprennent à la frontière du Tigré?
Les appels à la désescalade se multiplient depuis la reprise des combats, mercredi 24 août, en Éthiopie. Le gouvernement fédéral et les rebelles tigréens s’accusent mutuellement d’avoir relancé les hostilités, après cinq mois de trêve.
Gouvernement
et rebelles ont tous les deux fait état mercredi de combats dans une
zone frontalière du sud-est du Tigré, un territoire disputé, revendiqué
par les Amhara, qui sont alliés des forces fédérales dans ce conflit.
Les
rebelles ont annoncé que l’armée fédérale éthiopienne avait lancé une «
offensive à grande échelle », affirmant « défendre (leurs) positions ».
Quelques heures plus tard, le gouvernement a, lui, accusé les forces du
Front de libération du peuple du Tigré (TPLF) d’avoir « rompu la trêve »
en lançant une attaque.
Mercredi, le gouvernement fédéral a
affirmé avoir abattu un avion chargé d’armes destinées aux rebelles
tigréens – appareil qui aurait violé l’espace aérien, selon les
autorités. Une affirmation qualifiée de mensonge par les rebelles. Leurs
affirmations sont impossibles à vérifier, la région étant largement
coupée du reste du pays.
Plusieurs semaines de tensions grandissantes
Ces
dernières semaines, les rapports entre les deux camps se sont dégradés.
Malgré la succession d’émissaires américain, européen et onusien à
Mekele, capitale du Tigré, début août, les tentatives de médiation sont
au point mort, en raison de divergences sur plusieurs points.
Addis-Abeba
souhaite que les discussions soient parrainées par l’Union africaine et
commencent « sans condition préalable ». Mais les rebelles du Tigré,
eux, refusent la médiation de l’ancien président nigérian Olusegun
Obasanjo – dont ils mettent en cause l’impartialité. Autre condition :
les autorités tigréennes exigent avant toute discussion le
rétablissement des services essentiels (électricité,
télécommunications…) dont la région est privée.
Dans une lettre
mercredi, les autorités tigréennes ont admis que de contacts directs
avaient eu lieu, sans en préciser les dates, lors de « deux séries
confidentielles de pourparlers face-à-face avec des hauts responsables
militaires et civils » gouvernementaux, ayant permis de « s’entendre sur
une cessation des hostilités et une levée du blocus sur les services
essentiels ».
Mais pour Connor Vasey, du centre de réflexion
Eurasia, qui s’exprime auprès de l’AFP, « en pleine recrudescence des
combats, aucune partie ne va être disposée à réduire son poids dans de
futures négociations en faisant des compromis sur des questions-clés ». «
Au lieu de cela, elles chercheront probablement à utiliser la prochaine
phase des combats pour renforcer leurs positions de négociation »,
ajoute-t-il.
L’ONU, l’Union africaine, la SADC et les États-Unis
ont tous exprimé leur inquiétude après cette reprise des hostilités. Les
observateurs mettent en garde : une reprise des hostilités risquent de
faire échouer les efforts – déjà difficiles – d’amener les deux parties
vers des pourparlers de paix.