Élections : Les « milliards » d’ententes-directes !
Au Sénégal, pour l’organisation de la plupart des élections, les marchés d’achat d’urnes, d’isoloirs, ou encore de documents de vote, sont passés passé, dans leur écrasante majorité, par entente directe. Ce qui s’éloigne des dispositions du code des marchés publics et s’écarte du principe de transparence et d’économie de ressources budgétaires.
Plusieurs
marchés publiques ont été passés sans concurrence véritable pour
l’organisation des dernières élections locales. Il s’agit, par exemple,
du marché F0293/22DK octroyé à 333,5 millions de francs Cfa. Le marché
F0184/22DK alloué à 413,3 millions de francs Cfa. Le marché F0179/22DK
alloué à 450,1 millions de francs Cfa. Le marché F0180/22DK attribué à
594,8 de francs CFA et le marché F0236/22DK de 215,5 millions de francs
Cfa.
Au total, ce sont des marchés d’une valeur de plus de 2
milliards de francs Cfa, qui ont été passés par entente directe, rien
que pour les bulletins de vote pour les dernières élections locales. Ce
qui est loin du principe de l’objectif de transparence et d’économie
prôné par le Code des marchés publics (Cmp).
Pour l’instant, les
marchés pour le scrutin législatif n’ont pas été rendus publics. Mais,
pour la dernière présidentielle aussi, ce sont 13 marchés qui ont été
passés, entre 2018 et 2019, pour l’organisation matérielle de
l’élection présidentielle. Montant global : 1,3 milliard de francs Cfa.
La
Direction de l’automatisation des fichiers (Daf) avait acheté pour 50
millions de francs Cfa de cartouches d’encre et dépensé 50 millions de
francs Cfa pour acheter du papier A4 et A3. De son côté, la Direction
générale des élections (Dge) a passé 4 marchés pour l’acquisition de
bulletins de vote et documents de propagande pour un total de 254.7
millions de francs Cfa.
Ensuite, 130 millions de francs Cfa ont
été dépensés pour acquérir des carnets d’émargement, 175 millions pour
le logiciel de contrôle de parrainage et de gestion informatique des
résultats, 97.5 millions de francs Cfa pour le transport du matériel
électoral à l’étranger, 172.8 millions pour l’impression des documents
électoraux et 82.7 millions pour l’impression du fichier électoral. A
ceux-là, il faut ajouter le marché de 232.1 millions de francs Cfa
contracté par entente directe par la Commission électorale nationale
autonome (Cena) pour l’acquisition du matériel électoral.
Ces
marchés auraient-ils dû être passés par entente directe ? Le Code des
marchés publics, en son article 76, encadre strictement la passation des
marchés par entente directe. En effet, un marché peut être passé par
entente directe s’il y a une «urgence impérieuse résultant de
circonstances imprévisibles, irrésistibles et extérieures à
l’autorité». Tel ne semble pas être le cas pour les marchés des
scrutins.
Et pourtant, le Fonds monétaire international (Fmi)
avait bien tiré la sonnette d’alarme au terme de sa dernière revue. Elle
avait souligné que La résilience budgétaire et extérieure devra encore
être renforcée, surtout «en améliorant l’efficacité des dépenses,
notamment par un recours plus limité aux passations de marchés publics
sans appel d’offres.» Appel loin d’être entendu, pour le moment.