L’ordre public sanitaire en crise : Quelles mesures pour y faire face* ?

L’ordre public sanitaire en crise : Quelles mesures pour y faire face* ?

Depuis plusieurs semaines, l’humanité est plongée dans une crise sanitaire aux proportions redoutables et redoutées. S’étant déclaré en Chine, l’épidémie a traversé les frontières de l’Asie pour secouer toute l’Europe puis s’abat sur l’Afrique et l’Amérique. Le Sénégal enregistre son premier cas importé le 02 mars dernier et voit lamentablement le nombre de contaminés grimper au fil des jours. Cette situation d’une particulière gravité interroge en premier lieu la responsabilité sanitaire de l’État dans la nécessaire protection de l’ordre public sanitaire.

Devoir de veiller à la santé des populations

Cette responsabilité sanitaire de l’État résulte de la combinaison des articles 8 et 17 alinéa 2 de la Constitution du 22 janvier 2001 qui imposent à l’État le devoir de veiller à la santé des populations. En temps de crise, cette responsabilité sanitaire s’appuie essentiellement sur le Règlement sanitaire international de 2005 de l’OMS à la lecture duquel les États doivent mettre en place un système suffisamment adapté pour une réaction rapide et efficace contre tout risque sanitaire plus particulièrement en face d’une urgence sanitaire de portée internationale. De même, face à un événement sanitaire détecté́ par le système de surveillance, la réaction de l’État concerné doit tourner autour de quatre questions de savoir :

  • Les répercussions de l’évènement sur la santé sont-elles graves ?
  • L’évènement est-il inhabituel ou inattendu ?
  • Le risque important de propagation internationale est important ?
  • Le risque de restrictions aux voyages internationaux et au commerce international est important ?

Si au moins deux de ces questions reçoivent une réponse positive, l’événement doit être notifié à l’OMS. Une fois la notification est faite, il appartient au Directeur général de l’OMS, au regard des informations qui lui sont communiquées et analysées par le comité́ d’urgence, de déterminer si l’évènement constitue une urgence sanitaire de portée internationale. Le coronavirus a été déclaré urgence sanitaire le 30 janvier dernier débouchant sur deux types d’obligations. D’une part, il s’agit une obligation de portée interne qui pèse sur les États membres d’organiser leurs systèmes sanitaires pour faire face à la crise sanitaire. D’autre part, une obligation de portée externe qui commande la notification des cas aux points focaux désignés par l’OMS et la coopération entre les États membres de l’OMS pour lutter contre le fléau.

Mesures d’urgence au Sénégal

Atteint par la crise sanitaire, l’État du Sénégal après avoir enregistré son 24 ieme cas, a pris un certain de mesures d’urgence le 14 mars dernier, à travers son Président de la République :

-L’interdiction pour une durée de 30 jours de toutes les manifestations publiques sur l’ensemble du territoire national ;

-La suspension temporaire de l’accueil des bateaux de croisière sur le territoire national et le renforcement systématique des contrôles sanitaires au niveau des frontières ;

-La suspension des enseignements dans les écoles et universités pour une durée de 3 semaines ;

-La suspension des formalités nationales liées au pèlerinage pour l’année 2020 ;

– Le renforcement de la protection des personnels de santé, de sécurité, de défense et de secours mobilisés.

Le Chef de l’État met donc en œuvre sa compétence sanitaire reconnue par la Constitution aussi bien en période normale qu’en situation de crise.

La compétence sanitaire de Macky Sall

En temps normalIl tire également sa compétence sanitaire de son pouvoir règlementaire autonome et plus précisément de son pouvoir de police administrative générale, consacré à l’article 50 de la Constitution sénégalaise du 22 janvier 2001. Cette prérogative s’est inspirée de la jurisprudence du Conseil d’État français qui consacrait, pour la première fois, le pouvoir réglementaire général du Président de la République dans l’arrêt Labonne du 08 aout 1919. À ce titre, le Président de la République est le premier garant de l’ordre public sanitairesur l’ensemble du territoire national. Il peut, par le prisme de la prescription et de la règlementation, prendre toutes les mesures nécessaires à la préservation de l’ordre public sur l’ensemble du territoire dont la salubrité́ publique est une composante. Il peut interdire ou limiter toutes les activités qui sont de nature à présenter un risque majeur pour la santé publique.

On peut trouver également une source à la compétence sanitaire du chef de l’État sénégalais dans son rôle de gardien de la Constitution, reconnu à l’article 42 alinéa 1 de la Constitution.En tant que gardien de la Charte fondamentale, le Président doit veiller au respect de l’ensemble des dispositions qui consacrent le droit à la santé, ainsi que tous les droits qui concourent à sa réalisation. Le Président peut également être amené́ à s’arroser d’une compétence sanitaire en période de crise.

Thierno

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