Le goudron ne se mange pas, dites-vous ? (Par Abou Abel Thiam)
Ila Touba ! Ce qui était le cri de ralliement des
fidèles à la ville religieuse fondée par Cheikh Ahmadou Bamba a fini de
renvoyer, aussi, à plus de 200 km d’autoroute charriant les vertus du
développement, pour continuer, au-delà, dans le vaste Ferlo et les rives
du fleuve du Fleuve Sénégal. Golléré s’est rapprochée de Diamniadio,
WendouThigonly est devenue voisine de Thiès, Bambey n’est plus à deux
jours mais 6 heures de Ndioum, grâce à cette route. Cela a un nom : la
voie du progrès. Cette longue route, ce reptile de goudron qui serpente à
l’intérieur de nos terroirs pour rapprocher les hameaux des forages,
les champs des postes de santé, les cases des universités, les troupeaux
des usines, est le goudron du bonheur des populations.
Souvenirs
: alors Premier ministre, en 2007, MackySall venant de Matam, avait
contraint son cortège à s’engager dans le Ferlo, à l’époque un No Man’s
land d’une grande hostilité, quasiment infranchissable. Il fallait plus
de trois heures pour couvrir la distance Ourossogui-Ranérou, soit 80 km
impraticables. Me revient en image, celle de l’excellent caméraman de la
RTS, BellySy, faisant preuve de courage et d’initiative pour montrer au
plus près l’état de la route digne de figurer dans le Guinness des plus
périlleuses voies de circulation. Cette zone d’élevage, de chasse et
d’agriculture, est aujourd’hui connectée confortablement à l’aéroport
Blaise Diagne et au Port de Dakar, ses populations bénéficient du
programme de subvention des équipements agricoles, la réduction à 50 %
du coût du matériel d’élevage, des subventions à l’importation de vaches
à haute teneur laitière, dans le cadre de l’ANIPL…
Un
poncif habituel, tendant à réduire l’importance et la pertinence des
réalisations d’infrastructures, notamment routières, consiste à lancer
doctement : « Le goudron ne se mange pas ». Sauf à se limiter au sens
primaire de la boutade, le goudron se mange bien, puisqu’il fait manger.
Demandons donc, de savoir si le goudron se mange ou pas, aux
populations de Touba qui peuvent faire un aller-retour en une matinée à
l’hôpital pour enfants de Diamniadio ou les espaces ministériels, si ce
n’est pour venir regarder un match dans le sublime stade Abdoulaye
Wade, et rentrer pour la prière du soir. Posons donc la question à nos
forces de sécurité, bien équipées, devenues plus promptes à se porter au
secours des populations plus efficacement parce que pouvant le faire
plus rapidement. Grâce à ces vertèbres asphaltées et ces veines
goudronnées, nos terroirs se connectent, donc se rapprochent, et le tout
le pays est ainsi irrigué de ses différentes et différenciées
potentialités. Equité territoriale a dit, et fait, Macky Sall. N’est-ce
pas là les conditions d’accomplissement de l’industrialisation de notre
pays exposées dans le PAP 2 A, fruit d’une concertation patriotique
entre les secteurs public et privé ?
Un
pont sur le fleuve Gambie, un à Rosso, un à Foudiougne… Il n y a pas
que les populations casamançaises pour profiter du pont, cette main
tendue qui enjambe si superbement la frontière avec la Gambie,
permettant ainsi au Saloum de héler le Blouf pour lui proposer de
l’arachide en échange de mangues savoureuses. On n’est plus à l’époque
d’une seule voie maritime praticable en un temps raisonnable, ce qui
conduisait à la surcharge du tristement célèbre bateau le Joola.
Ne
voilà-t-il pas que, de telles réalisations au centre et au sud
rapprochent le port de Dakar actuel, ceux de Ndayane et Sendou qui
sortent de terre et mer, des zones rurales et leurs productions. Lorsque
se terminera, bientôt, la seconde phase du TER, en appoint à
l’autoroute Mbour-Kaolack, c’est une double dorsale de mobilité expresse
qui traversera le pays, laissant bouche-bée ceux qui ont connu les
affres du sous-équipement infrastructurel dont souffrait notre pays il n
y a guère.
Paris
a connu son baron Haussmann, le Sénégal peut s’enorgueillir de ce que
Macky Sall est en train de transformer l’architecture infrastructurelle
du pays. C’est à dessein que j’omets les autres belles et importantes
réalisations, notamment à Dakar. Il y en a assez pour que chacun se
fasse sa liste.
Abou Abel THIAM