Présidentielle: à 5 jours du premier tour, la campagne peut-elle encore basculer?

Présidentielle: à 5 jours du premier tour, la campagne peut-elle encore basculer?

Si le duel Emmanuel Macron – Marine Le Pen est annoncé par tous les sondages, les experts électoraux n’écartent pas la possibilité d’une surprise. Fait divers qui rabattrait les cartes, forte abstention, mobilisation importante de la gauche pour Jean-Luc Mélenchon… Plusieurs options pourraient bouleverser le premier tour.

Assistera-t-on à un coup de théâtre au premier tour? Si les études d’opinion donnent systématiquement Emmanuel Macron et Marine Le Pen qualifiés au second tour depuis des semaines, les jeux sont loin d’être faits, a assuré le président-candidat lors de son premier meeting le week-end dernier. Si certains observateurs jugent hautement improbable que les cartes soient rebattues à quelques jours de l’échéance, d’autres routiers de la politique n’écartent aucune hypothèse.

Voici 4 scénarios qui pourraient encore faire déjouer les pronostics.

Scénario 1: un événement inattendu fait dérailler la campagne

« Moi, je suis confiant… Si on ne nous fait pas une Papy Voise d’ici là », confie à BFTMTV.com un pilier de la majorité.

Le visage tuméfié de ce septuagénaire, violemment agressé par deux cambrioleurs, avait fait la une des journaux télévisés quatre jours avant la présidentielle de 2002. Cette affaire, devenue le symbole de l’insécurité, aurait fait basculer l’élection et contribué à l’accession au second tour de Jean-Marie Le Pen, pourtant donné derrière Lionel Jospin et Jacques Chirac dans les sondages.

Cette fébrilité dans le camp de la macronie, vue par certains comme un élément de langage pour mobiliser les sympathisants d’Emmanuel Macron, est partagée par Gaspard Gantzer. « Quand on a une campagne très resserrée, dans un espace-temps très court avec un président qui s’est déclaré le jour limite et qu’on voit très peu sur le terrain, ça rend les derniers jours particulièrement décisifs », estime l’ancien communicant de François Hollande à l’Élysée.

« Faire une campagne d’une très grande prudence, vous rend à la merci d’un faits divers ou d’un exploit de votre adversaire », résume-t-il.

Sur les bancs de la République en marche, on suit ainsi de très près l’affaire Jérémy Cohen, ce jeune homme de confession juive écrasé par un tramway à Bobigny alors qu’il tentait de fuir des agresseurs – certains candidats à l’élection présidentielle s’interrogeant sur un possible motif antisémite, ce qui n’a pour l’heure pas été évoqué par le parquet. Le cabinet d’Emmanuel Macron a d’ailleurs appelé sa famille.

• Scénario 2: une forte abstention fait trébucher Marine Le Pen

« Emmanuel Macron a une chance. C’est qu’il a un électorat peu sensible à l’abstention. Donc ça lui permet d’avoir une relative confiance dans son score de premier tour. Mais pour Marine Le Pen, c’est très différent », analyse le constitutionnaliste Benjamin Morel.

L’électorat de la représentante du RN est en effet celui qui a le plus tendance à s’abstenir. Pour expliquer les mauvais résultats de son parti aux régionales en 2021, qui n’était arrivé en tête qu’en région Sud-Paca au premier tour alors que les sondages le mettaient en tête dans 6 régions sur 13, la candidate avait elle-même pointé du doigt l’abstention record (66,72%).

Pour l’heure cependant, les électeurs de Marine Le Pen sont parmi les plus décidés: ils sont 84% à se dire sûrs de leur choix, contre 79% pour Eric Zemmour ou 74% pour Valérie Pécresse, selon notre dernier sondage Elabe réalisé pour BFMTV et L’Express avec notre partenaire SFR.

• Scénario 3: Eric Zemmour est « sous-estimé » et crée la surprise

Si le patron de Reconquête est à la peine dans les études d’opinion, (9% seulement dans notre dernier sondage Elabe), on assure dans son camp toujours y croire.

« Quand vous voyez toutes les salles remplies, nos audiences à la télé… On est sous-estimé dans les sondages, c’est certain. Et ça va finir par se voir », s’enflammait il y a quelques jours Philippe Izraelewicz, coordinateur régional de la campagne, auprès de BFMTV.com.

« Éric Zemmour est tellement loin du premier tour dans les sondages du second tour que je ne les vois pas y accéder, même si ses électeurs se surmobilisent », juge cependant Bruno Cautrès, chercheur au Cevipof.

• Scénario 4: les électeurs de gauche se surmobilisent pour Jean-Luc Mélenchon

Cherchant à se présenter comme le « vote utile », Jean-Luc Mélenchon a grapillé lentement mais sûrement des points à gauche, jusqu’à atteindre les 15,5% dans notre dernier sondage Elabe. De quoi donner de l’espoir à la France insoumise, qui n’a de cesse d’appeler ses électeurs à voter pour « un programme » plus que pour une « personnalité ».

« Je ne vois pas vraiment là où sont encore ses réserves de voix pour accéder au scond tour », tempère le politologue Benjamin Morel. « Il fait déjà le plein à gauche chez les partisans de Yannick Jadot, Fabien Roussel et Anne Hidalgo à l’instant T… Mais il est possible que ces électeurs-là se disent finalement au dernier moment qu’ils vont glisser un bulletin dans l’urne pour Jean-Luc Mélenchon. »

Alors que les scores de la socialiste, de l’écologiste et du communiste cumulés représentent entre 9 et 10% des intentions de vote, la nouvelle a de quoi donner le sourire aux insoumis. D’autant que le socle des électeurs de Yannick Jadot apparaît très fragile – ils sont 49% à dire qu’ils pourraient changer d’avis d’ici le premier tour, selon notre dernier sondage Elabe.

« Moi, j’ai eu envie de rentrer en politique en 2002 après la surprise Jean-Marie Le Pen. Je crois que tous les gens de ma génération sont conscients que tout est possible pour ce second tour et qu’on n’est pas à l’abri d’un scénario que personne n’aura vu venir », jure de son côté le député LaREM Sacha Houlié.

De quoi donner un peu de relief à cette drôle de campagne.

Souare Mansour

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