« Jeunes de mon pays, en tout pensez d’abord à votre avenir ! » (Par Mody NIANG)
Nous vivons la soixante-deuxième
année de l’accession de notre pays à la souveraineté internationale. En
d’autres termes, à l’indépendance ou ce qui est considéré comme tel.
Cette indépendance, nos autorités de l’époque l’ont proclamée le 20 août
1960, après que notre pays s’est retiré de la Fédération du Mali, qui
regroupait le Sénégal et l’ancien Soudan français. Les autorités de
cepays ont gardé le nom Mali, malgré l’éclatement de la Fédération.Notre
premier Président de la République est Léopold Sédar Senghor, quil’a
été du 5 septembre 1960 au 31 décembre 1980. Á cette date, il a quitté
volontairement le pouvoir au profit de son Premier ministre d’alors,
Abdou Diouf. Ce dernier est resté 19 ans à la tête de notre pays, du 31
décembre 1980 au 19 mars 2000. Ce jour-là, les Sénégalaises et les
sénégalais lui ont retiré leur confiance pour l’accorder, à 58% des
suffrages exprimés, à Abdoulaye Wade. Cette victoire mettait donc un
terme au pouvoir des socialistes qui aura duré quarante (40) longues
années. Me Wade sera officiellement installé comme troisième Président
de la République le 1er avril 2000, après une longue opposition de
vingt-six (26) ans .
Avec
lui donc, arrivaient au pouvoir les libéraux ou ceux qu’on considérait
comme tels. Il restera à la tête du pays pendant douze longues années,
du 1er avril 2000 au 25 mars 2012, date de sa cuisante défaite au profit
de son « fils » et sosie Macky Sall, auquel les Sénégalaises et les
Sénégalais ont accordé leur confiance pour 65% des suffrages exprimés.
Depuis son installation comme quatrième Président de la République le 2
avril 2012, il prolonge la gouvernance dite libérale. Le 24 février
2019, il a été réélu et dès le premier tour à un peu plus de 58% des
suffrages exprimés, pour un second et dernier mandat qui se terminera en
février ou mars 2024, année à laquelle un nouveau président de la
République sera élu.
Donc, jeunes de mon pays, nous sommes
indépendants ou sensés l’être depuis plus de soixante-et-un (61) ans et
faisons encore partie, dit-on, de la liste peu enviable des 25 pays les
plus pauvres et les plus endettés du monde. Pourtant, nos premiers
gouvernants s’engageaient à sortir notre pays du sous-développement dans
un délai raisonnable, et mettaient en place des plans (quinquennaux) de
développement pour y arriver. Le président Senghor présageait déjà très
tôt que Dakar, la capitale de notre pays, serait comme Paris en l’an
2000. Nous sommes en l’an 2022, soit plus de cinquante (50) ans après.
Dakar est ce qu’elle est devenue, et nous le vivons ensemble : une ville
désordonnée, encore sale malgré les efforts constatés çà et là, envahie
d’ordures de toutes sortes, d’eaux usées nauséabondes et surtout de
gravas qui constituent une plaie béante échappant pourtant à notre
attention ; une ville où se déplacer en véhicules devient une véritable
gageure, malgré la mise en circulation de ce coûteux TER dont on nous
disait, en bombant le torse, qu’il améliorerait notablement la mobilité
urbaine. Il n’en a rien été et Dakar, la capitale nationale, est envahie
par des charrettes et surtout de ce qu’on appelle des véhicules «
clandos » qui sont de plus en plus nombreux, peut-être même plus
nombreux que les véhicules dits réguliers. Les cimetières de véhicules
sont vidés aujourd’hui et de toute l’étendue du territoire national, de
Matam, de Louga, de Diourbel-Mbacké, de Kaolack-Kaffrine, de
Tamba-Kédougou, de Sédhiou-Kolda, etc., nous viennent des véhicules qui
ne le sont que de noms. Et ce qui est choquant, qui me choque en tout
cas, c’est que ces « clandos » et ces charrettes, auxquels s’ajoutent
des milliers de « Jakarta », ne dérangent personne.
Voilà
donc ce qu’est devenue Dakar en 2022, à l’image d’ailleurs de tout le
pays ou presque. Aujourd’hui, plusieurs secteurs sociaux comme l’école
et la santé, pour ne citer que ceux-là, sont malades, très malades. En
attestent les grèves qui chauffent le front social, souvent légitimement
et dont les principaux responsables sont le vieux président-politicien
et son successeur et sosie le président-politicien Jr. Ils ont
outrancièrement politisé notre administration et carrément détraqué
notre système de rémunération des agents publics et d’octroi
d’indemnités.Á la tête du client, ils augmentent des salaires et
distribuent de façon irresponsable des indemnités diverses : de
logement, de judicature, celles octroyées à la place des véhicules dits
administratifs, etc. Ce qui est plus choquant encore dans leur
irresponsabilité et qui explique toutes les frustrations qui chauffent
le front social aujourd’hui, c’est le montant exorbitant de ces
indemnités qu’ils accordent à une minorité de compatriotes qui sont déjà
pourtant gâtés par de nombreux autres avantages. Quand le vieux
président-politicien accordait une indemnité de judicature de 800.000
francsaux magistrats, des professeurs d’université de rang A n’avaient
pas un salaire net de plus de 600.000 francs et des médecins, des
Ingénieurs de toutes catégories, des administrateurs civils, des
professeurs d’enseignement secondaire et des inspecteurs d’enseignement
les plus gradés n’avaient pas plus de 300.000 francs de salaire mensuel.
Et encore ! Personnellement, quand je faisais prévaloir mes droits à
une pension de retraite, en tant qu’inspecteur de l’enseignement
élémentaire de classe exceptionnelle (hiérarchie A 1), mon salaire
atteignait à peine les 300.000 francs.
Si
on ajoute à cette confortable indemnité celle aussi confortable de
logement qui va pour eux d’un million (1.000.000) à cinq cent mille
(500.000) francs, sans compter une autre possible de fonction, ils
peuvent se retrouver, avec les seules indemnités, à deux millions
(2.000.000) de francs ou plus. Sans compter que les fonds communs sont
désormais étendus à leur corps. Sans compter que, quand il ya un
lotissement quelque part, leur association reçoit souvent son quota de
terrains. Les fonds communs ont été accordés, semble-t-il, du temps de
Jean Collin. Ils sont attribués dans des conditions qui peuvent heurter
sur la base, semble-t-il, des redressements fiscaux et autres actes
contribuant à faire monter notablement les recettes fiscales. Que donne
l’État à des médecins qui, affectés dans les coins les plus reculés du
Sénégal et travaillant dans des conditions souvent très difficiles,
sauvent des vies avec l’assentiment du Seigneur ? Et les enseignants,
qui sont malheureusement de moins en moins nombreux, qui sacrifient tout
à leur difficile métier et font chaque années d’excellents résultats
dans les différents examens et concours ? Que leur propose l’État à la
place des fonds communs ? Cette iniquité qui dure depuis de longues
années doit être sérieusement repensée.
Je peux donner l’exemple des
forces de défense et de sécurité au profit de qui l’indemnité de
logement a été généralisée. Il semble même que les officiers généraux
vont à la retraite avec le même salaire qu’ils touchaient en activité,
en même temps que l’indemnité substantielle de logement. Évidemment, je
prends des risques en donnant en exemples ces gens-là et des magistrats,
moi qu’un juge a condamné pour avoir seulement préfacé le livre de Papa
Allé Niang qui mettait en cause la gestion du COUD par Cheikh Oumar
Hanne. Le juge me reprochait d’y avoir traité cette gestion de
scandaleuse. Je connais particulièrement le dossier de M. Hanne, et si
j’avais en tête un qualificatif plus dur, je l’aurais attribué à sa
gestion.Je connais bien d’autres, aussi lourds les uns que les autres,
qui dorment sur la table du Président de la république et celle de son
procureur. Ces dossiers sont des rapportsdes corps de contrôle
(Inspection générale d’État, Cour des Comptes, Office national de lutte
contre la Fraude et la Corruption, Autorité de Régulation des Marchés
publics) mettant gravement en cause des hommes et des femmes qui
gravitaient tous et toutes autour du vieux président-politicien, les
mêmes qu’on retrouve pratiquement autour du président-politicien Jr.
Quand on évoque ces dossiers, on s’entend rétorquer facilement
l’argument qu’il faut cesser de citer leurs noms, car ils (elles) sont
présumé(e)s innocent(e)s jusqu’à preuve du contraire. Qu’on les juge,
pour nous permettre d’en avoir le cœur net ! Tant qu’ils (elles) ne le
seront pas, nous croirons plutôt à leur culpabilité. Pourquoi a-t-on
peur de les juger ? Pourquoi le Président-politicien Jr met-il
lourdement le coude sur ces dossiers, aussi bien ceux qui gisent sur sa
table comme ceux qui dorment à poings fermés sur le bureau de son
procureur ? En tout cas, moi Mody Niang, je crois davantage à leur
culpabilité. Depuis le 1er avril 2000, je crois bien plus à la
présomption de culpabilité qu’à celle d’innocence. Quand on est
innocent, on ne met pas du tout à le prouver. Que personne ne m’oppose
surtout pas le temps de la justice ! Ces dossiers dorment quand même
depuis vingt-deux (22) longues années. Pourquoi nos magistrats les
ont-ils laissés là où ils sont pour trouver le temps de traiter celui de
Khalifa Ababacar, Sall avec toute la diligence qui n’a échappé à
personne. Basta waay !
Mes
chers jeunes compatriotes, pour revenir à vous, ce texte est déjà long
et s’il l’est un peu plus, vous n’aurez certainement pas le temps de le
lire de façon intégrale, vos études et autres préoccupations ne vous le
permettant pas. Je le conclus donc ici, avec le ferme engagement à
revenir très bientôt, dans une seconde contribution, pour vous expliquer
largement pourquoi je me suis permis de vous interpeller, dès le titre
de ce texte.
Dakar, le 21 février 2022
Mody Niang