Après Lat Diop, Farba Ngom, Moustapha Diop: À qui le tour dans la galaxie de l’ancien régime ?
La vague de reddition des comptes promise par le tandem Bassirou Diomaye Faye et Ousmane Sonko semble s’accélérer, emportant dans son sillage d’anciennes figures de l’ère Macky Sall. L’immunité parlementaire de Moustapha Diop, récemment levée par l’Assemblée nationale, suit de près celle de Farba Ngom, ancien député aujourd’hui incarcéré. Lat Diop, autre personnage influent de l’ancien régime, a également été emprisonné. Ces développements soulèvent une question brûlante : à qui le tour ? Et surtout, quid de Macky Sall lui-même, dont la gestion passée est désormais sous les projecteurs impitoyables des rapports d’audit ?
Les
rapports de l’Office national de lutte contre la fraude et la
corruption (OFNAC), de la Cellule nationale de traitement des
informations financières (CENTIF), de la Cour des comptes, ainsi que
celui sur la gestion des fonds Force Covid, constituent le socle de
cette opération « mains propres ». Publiés sous l’impulsion du président
Bassirou Diomaye Faye dès avril 2024, ces documents révèlent un tableau
sombre de la gouvernance sous l’ancien régime. La Cour des comptes, par
exemple, a mis en lumière des « fautes de gestion et des infractions
pénales présumées » dans la gestion des fonds Covid pour 2020-2021,
épinglant des ministres et des responsables administratifs. Le rapport
OFNAC de 2020 a, quant à lui, dénoncé un scandale autour des 69
milliards de FCFA destinés à l’aide alimentaire, impliquant des marchés
douteux, comme celui attribué à Diop Sy via une société en faillite. La
CENTIF a signalé des flux financiers suspects, menant à des enquêtes sur
des détournements dépassant les 125 milliards de FCFA.
Ces
révélations ne sont pas restées lettre morte. Farba Ngom, dont
l’immunité a été levée, a été rattrapé par les conclusions de ces
audits, tout comme Moustapha Diop, visé dans l’affaire Tabaski Ngom. Lat
Diop, ancien ministre et proche de Macky Sall, n’a pas échappé à cette
lame de fond. Ces arrestations et levées d’immunité traduisent une
volonté affichée de faire tomber les masques, mais elles alimentent
aussi les spéculations : jusqu’où ira cette traque ? Et surtout,
l’ancien président Macky Sall restera-t-il intouchable ?
Les promesses de Sonko et Faye : une rupture sans compromis
Lors
de sa déclaration de politique générale le 27 décembre 2024, Ousmane
Sonko, Premier ministre, n’avait pas mâché ses mots : « Le régime de
Macky Sall a menti au peuple et aux partenaires en falsifiant les
chiffres pour donner une image économique qui n’a rien à voir avec la
réalité. » Cette phrase, prononcée devant l’Assemblée nationale, résonne
comme un acte d’accusation contre douze années de gouvernance. Sonko
avait déjà, en septembre 2024, dénoncé une situation « catastrophique »
des finances publiques, avec un déficit budgétaire de 10,4 % du PIB et
une dette publique flirtant avec les 99 % du PIB, selon la Cour des
comptes, bien loin des chiffres officiels avancés sous Sall.
Bassirou
Diomaye Faye, de son côté, avait fait de la transparence une pierre
angulaire de sa campagne. Lors du Conseil des ministres du 17 avril
2024, il ordonnait la publication des rapports des cinq dernières
années, déclarant : « La reddition des comptes est un impératif pour
restaurer la confiance des citoyens dans leurs institutions. » Cette
promesse de rupture systémique, martelée durant la campagne de mars
2024, trouve aujourd’hui un écho concret dans les enquêtes judiciaires
et les mises en détention.
Macky Sall dans le viseur ?
Si
les lieutenants de l’ancien régime tombent les uns après les autres,
les regards se tournent naturellement vers Macky Sall. Exilé depuis son
départ du pouvoir, l’ancien président voit son ombre planer sur chaque
scandale révélé. Le rapport de la Cour des comptes de février 2025, qui
étrille sa gestion financière entre 2019 et 2024, pointe des «
manquements, anomalies et irrégularités » ayant plombé la trésorerie de
l’État. Les accusations de « falsification des données économiques »
portées par Sonko et validées par les audits jettent une lumière crue
sur son bilan. Mais jusqu’à présent, aucune procédure directe n’a été
engagée contre lui. Est-ce une question de temps ou une limite que le
nouveau pouvoir n’ose pas franchir ?
Dans
la galaxie de l’ancien régime, d’autres noms circulent : anciens
ministres, directeurs généraux, proches collaborateurs. Les rapports
mentionnent des personnalités comme Mansour Faye, que l’on dit impliqué
dans la gestion controversée des fonds Covid. La liste est longue, et le
Pool judiciaire financier, activé sous Diomaye Faye, semble déterminé à
ne laisser aucune pierre non retournée.
Macky Sall, ses alliés politiques, ses soutiens économiques – tous pourraient, à terme, être rattrapés par les fantômes d’une gestion passée. Une chose est sûre : la reddition des comptes n’est plus une simple promesse, mais une réalité qui avance, implacable. À qui le tour ? L’avenir nous le dira.