RDC: « Il faut éviter à tout prix une escalade régionale », lance le chef de l’ONU
« Il faut éviter à tout prix une escalade
régionale » dans le conflit qui ravage l’est de la République
démocratique du Congo (RDC), a affirmé samedi le secrétaire général de
l’ONU Antonio Guterres à l’ouverture du sommet de l’Union africaine
(UA), alors que des combattants du M23 alliés à des troupes rwandaises
sont entrés la veille dans Bukavu.
Dans
l’est de la RDC, le groupe armé M23 (« Mouvement du 23 mars ») soutenu
par le Rwanda a pris fin janvier le contrôle de Goma, capitale
provinciale du Nord-Kivu, avant de progresser dans la région voisine du
Sud-Kivu. Les récents affrontements dans cette région, secouée par des
violences depuis trente ans, ont fait au moins 2.900 morts, selon l’ONU.
Vendredi,
le M23 et les troupes rwandaises ont pris le contrôle de l’aéroport de
Bukavu, la capitale du Sud-Kivu, site stratégique, où étaient
positionnées les forces armées congolaises. Puis, selon des sources
sécuritaire et humanitaire, une avant-garde a pénétré dans la ville par
ses quartiers nord-ouest.
La
chute imminente de Bukavu, déjà tombée en 2004 aux mains de soldats
dissidents de l’armée congolaise, donnerait au M23 et aux troupes
rwandaises le contrôle total du Lac Kivu, qui s’étire le long de la
frontière rwandaise.
En face, l’armée congolaise est notamment soutenue par des troupes sud-africaines et burundaises.
Des
tirs sporadiques résonnent encore à Bukavu samedi matin, selon des
journalistes de l’AFP. Les habitants restent majoritairement terrés chez
eux. Les rues sont quasi désertes, il n’y a pas de circulation. Des
pillages survenus au cours de la nuit ont été signalés.
« La
souveraineté et l’intégrité territoriale de la RDC doivent être
respectées », a exhorté le chef de l’ONU, lors de l’ouverture du sommet
annuel de l’Union africaine (UA) à Addis Abeba. S’il a pointé du doigt
la responsabilité du M23, le secrétaire général de l’ONU n’a pas
mentionné le Rwanda.
« La
violation en cours de l’intégrité territoriale de la RDC ne restera pas
sans réponse », a affirmé samedi un porte-parole de l’UE pour les
Affaires étrangères, Anouar El Anouni, tout en blâmant des « forces du
M23, soutenues par le Rwanda ». « L’UE examine en urgence toutes les
options à sa disposition », a-t-il poursuivi.
Environ 4.000 militaires rwandais interviennent dans l’Est de la RDC, selon l’ONU.
Ce
conflit fait planer le risque d’une guerre régionale, plusieurs des
voisins de la RDC, immense pays de l’Afrique centrale, ayant une
présence militaire sur le sol congolais.
– Lettres mortes –
Depuis
la récente intensification du conflit, et alors que Kinshasa réclame en
vain des sanctions internationales contre Kigali, les appels de la
communauté internationale à une désescalade et à un cessez-le-feu se
sont multipliés, notamment de la part des dirigeants d’Afrique de l’Est.
Mais ils sont restés lettres mortes.
Félix
Tshisekedi n’a pas pris part à une réunion du Conseil paix et sécurité
de l’UA vendredi et était à une conférence sur la sécurité, organisée à
Munich (Allemagne), d’où il a dénoncé les « velléités expansionnistes » du
Rwanda et appelé à le « mettre à l’index ».
Il était initialement annoncé présent au sommet des chefs d’Etats ce week-end, mais y a finalement renoncé.
L’UA
a été critiqué dans certaines de ses positions, jugées trop timorées et
favorables à Kigali. Certains communiqués du président sortant de la
Commission de l’UA, le Tchadien Moussa Faki Mahamat, s’ils appelaient à
la fin des combats, ne mentionnaient pas le Rwanda.
« L’UA
n’a aucun pouvoir dans ce conflit et est spectatrice », pointe du doigt
auprès de l’AFP Thierry Vircoulon, de l’Institut français des relations
internationales (Ifri).
– Trois candidats –
Le
président angolais João Lourenço, très impliqué depuis plusieurs années
dans les tentatives de médiation entre RDC et Rwanda, a pris samedi, à
la suite du chef de l’Etat mauritianien Mohamed Ould Cheikh El
Ghazouani, la présidence tournante de l’UA, un rôle honorifique.
A
l’issue du sommet, un nouveau président de la Commission de l’UA sera
désigné pour succéder au Tchadien Moussa Faki Mahamat, qui a atteint la
limite des deux mandats pour ce rôle exécutif.
Trois
candidats se disputent le poste tournant de plus haut représentant de
l’organisation panafricaine, réservé cette fois à un représentant de
l’Afrique de l’Est: le ministre des Affaires étrangères djiboutien
Mahmoud Ali Youssouf, le vétéran de l’opposition kényane Raila Odinga et
l’ancien ministre des Affaires étrangères malgache Richard
Randriamandrato.
Pour nombre d’observateurs des arcanes de l’institution panafricaine, l’issue du scrutin est incertaine.
AFP