L’État revendique l’initiative de la fin de l’accord de pêche avec l’UE
Des ministres sénégalais ont assuré que le gouvernement, et non pas l’UE, était l’instigateur de l’arrêt dimanche soir des activités de pêche de bateaux européens dans les eaux nationales.
« Nos
amis de l’Union européenne ont organisé une conférence de presse pour
dire au monde entier qu’ils ont décidé de ne plus signer les accords de
pêche avec le gouvernement du Sénégal. C’est une contre-vérité absolue »,
a déclaré mercredi soir le ministre de l’Enseignement supérieur
Abdourahmane Diouf, selon une vidéo visionnée jeudi sur les réseaux
sociaux.
« C’est
le gouvernement du Sénégal (…) qui a donné le signal depuis longtemps
pour leur dire que nous ne pouvons pas continuer à signer avec vous des
accords de pêche qui vont appauvrir les pêcheurs du Sénégal », a-t-il
dit lors d’un meeting du Pastef en vue des législatives de dimanche.
L’Union
européenne a annoncé mardi que l’accord de pêche en vigueur depuis 2019
ne serait pas renouvelé et que les bateaux européens cesseraient de
pêcher dans les eaux sénégalaises à partir de dimanche minuit. L’UE
invoque des « défaillances » constatées depuis plusieurs années de la part
du Sénégal dans la lutte contre la pêche illicite.
Cette annonce a eu un écho important au Sénégal, où la pêche est un secteur primordial et en crise.
Les
quelque 50.000 pêcheurs sénégalais travaillent essentiellement sur des
pirogues traditionnelles. Ils dénoncent constamment la concurrence des
bateaux usines contrôlés par des étrangers, auxquels ils imputent la
raréfaction du poisson.
L’accord
prend fin dans un contexte de changement à la tête du pays. Les
nouveaux dirigeants ont fait d’une répartition plus équitable des
revenus des ressources naturelles au bénéfice des Sénégalais un de leurs
mantras.
Le
président Bassirou Diomaye Faye a demandé en mai « l’audit du pavillon
sénégalais » caractérisé par son opacité, ainsi que l’évaluation des
accords et licences de pêche.
La ministre des Pêches Fatou Diouf a dénié à l’UE l’initiative de la fin de l’accord.
« L’État n’était pas encore dans une logique de négocier », dit-elle dans une vidéo sur les réseaux sociaux.
« Dès
mon arrivée ici, avant même qu’on ait reçu le carton jaune, j’avais
commandité une évaluation et cette évaluation, elle est en cours. On ne
peut pas commander une évaluation, attendre les résultats et penser à un
accord de pêche », dit-elle.
La
Commission européenne a adressé fin mai ce qu’elle a présenté comme un
« carton jaune » au Sénégal, identifié comme « pays non coopératif » face à
la pêche illicite.
La fin de l’accord concerne 18 bateaux espagnols et français, selon l’Union.
Le
ministère sénégalais avait publié en mai une liste de 132 navires
industriels autorisés à pêcher dans les eaux sénégalaises, dont 19
européens et 132 battant pavillon sénégalais.
Différents
acteurs dénoncent le fait que de nombreux bateaux enregistrés comme
sénégalais sont en fait entre les mains d’étrangers, notamment
asiatiques, qui se servent de prête-noms.
La liste répertoriait aussi 17.400 pirogues artisanales.