Présidentielle : Macky Sall va-t-il céder à la pression de Karim Wade ou couper la poire en deux ?
Aujourd’hui 22 février, rien n’est encore clair à
propos de la tenue du scrutin présidentiel qui devait initialement se
tenir ce 25 février, soit dans trois jours. Malgré les décisions du
Conseil constitutionnel, invalidant le report et maintenant la liste
définitive des 19 candidats à la suite du retrait de Rose Wardini, le
chef de l’Etat sortant campe sur son souhait d’appeler à des
concertations. En attendant de s’adresser aux Sénégalais à 19h, à
travers un entretien avec un groupe de médias, dont Seneweb, celui-ci
revient sur d’éventuelles options. En effet, tous s’accordent sur le
fait que le risque est bien réel d’aboutir, le 2 avril, à une
controverse juridique insoluble. D’un côté, Macky Sall n’aurait pas
encore de successeur désigné au suffrage universel au dernier jour de
son mandat. C’est pour cette raison que des membres de la coalition au
pouvoir invoquent à tort ou à raison l’article 36 de la Constitution qui
dispose que le président sortant reste en poste jusqu’à l’installation
de son successeur.
De
l’autre, la situation ne correspondrait ni à une situation de « vacance
» du pouvoir ni à un « empêchement » du président en fonction –deux
situations prévues par la charte fondamentale dans lesquelles l’intérim
doit être assuré par le président de l’Assemblée nationale.
Mais
au-delà de cet imbroglio autour de l’expiration du mandat du chef de
l’État, un autre scénario rend la situation encore plus confuse. Mais,
il se profile. Même si le camp présidentiel et jusqu’au chef de l’État
lui-même, nul ne s’est encore aventuré à préconiser de reprendre à zéro
le processus de sélection des candidatures, le feuilleton délétère qui
agite le Sénégal a été initié par Karim Wade et ses partisans sur la
base du constat suivant : tandis que le candidat du Parti démocratique
sénégalais (PDS) a vu sa candidature invalidée pour cause de double
nationalité, la candidate Rose Wardini, elle, a pu un temps figurer sur
la liste des 20 candidats retenus au terme du processus de sélection
malgré une double nationalité révélée a posteriori. Celle-ci a fait
connaître, le 19 février, sa décision de jeter l’éponge et pourtant le
nom de Karim Wade n’y figure toujours pas.
Mais
sa réponse ne s’est pas faite attendre. Le 20 février, c’est par un
communiqué du Front démocratique pour une élection inclusive (FDPEI),
une nouvelle plateforme réunissant autour de lui une quinzaine de petits
candidats recalés, que Karim Wade a posé ses revendications sur la
table. Et celles-ci sont sans ambiguïté. « Un autre scrutin présidentiel
et un autre processus électoral deviennent inévitables », assurent les
signataires, lesquels assènent que « la reprise du processus n’est pas
négociable », rappelle Jeune Afrique.
L’autre
fait qui risque de faire couler beaucoup d’encre, c’est qu’une reprise
intégrale du processus électoral impliquerait que les 19 candidatures
actuellement retenues deviendraient caduques. De l’autre côté, les
prétendants s’estimant spoliés en raison de l’invalidation de leurs
parrainages, les candidats retenus in fine et le candidat écarté pour
une prétendue double nationalité abandonnée trop tardivement seraient
désormais tous logés à la même enseigne.
Rouvrir le processus tout en maintenant les candidats retenus ?
Et
face à ces obstacles, d’autres voix se sont élevées pour prédire que le
président Sall n’exclurait pas de couper la poire en deux en décrétant
la réouverture du processus tout en maintenant la liste des candidats
retenus par les « Sept sages » du Conseil constitutionnel. C’est le cas
de Marwane Ben Yahmed, éditorialiste et directeur de publication de
« Jeune Afrique », qui a souligné que l’heure est à sauver l’essentiel : «
Organiser au plus vite la Présidentielle, dans les moins mauvaises
conditions et sortir par le haut ». De son avis, dans la tête du
président Macky Sall, son plan de sortie de crise est clair : « Mener
des concertations politiques afin de dégager un consensus autour des
règles du jeu du scrutin, organiser l’élection la plus inclusive
possible en conservant les vingt candidats validés par le Conseil, mais
en y ajoutant d’autres, revoir le système des parrainages en le limitant
à l’onction non plus des citoyens, mais des élus, promulguer une loi
d’amnistie afin d’apaiser les esprits, ce qui revient à libérer Ousmane
Sonko et Bassirou Diomaye Faye, jugés moins dangereux libres qu’en
prison où ils ont revêtu les habits de martyrs ». Reste maintenant à
savoir quelle sera l’attitude du Conseil constitutionnel ?
En
tout état de cause, les candidats à l’élection présidentielle du 25
février, regroupés autour d’un front (FC25), ont fait savoir qu’ils ne
l’entendaient pas de cette oreille. Dans leur dernier communiqué, ils
dénoncent « un sabotage en cours de l’élection présidentielle par Macky
Sall ». Constatant que, depuis la décision du Conseil constitutionnel
rendue le 15 février, « tout fonctionne au rythme de la mauvaise volonté
du président Macky Sall pour déclencher le processus de sa succession
inévitable », ce collectif « condamne fermement toute tentative de
retarder le processus électoral et de violer les droits légitimes des
candidats ».
Seuls
trois d’entre eux manquent à l’appel parmi les signataires du FC25 : le
Premier ministre de Macky Sall, Amadou Ba ; son prédécesseur, Mahammed
Boun Abdallah Dionne ; et celui qui était jusqu’à une date récente le
président du Conseil économique, social et environnemental, Idrissa
Seck, rappelle, de son côté, « JA ».