Appels à manifester : les politiques plus actifs sur les réseaux sociaux que sur le terrain

Appels à manifester : les politiques plus actifs sur les réseaux sociaux que sur le terrain

La mobilisation est forte sur les réseaux sociaux. Elle bat de l’aile sur le terrain. Sur Facebook, Twitter, Instagram, WhatsApp, TikTok entre autres plateformes, des leaders de l’opposition appellent à manifester pour dire non à la réforme constitutionnelle prolongeant le mandat de Macky Sall. Cependant, dans la rue, la réalité est tout autre. Ce décalage entre la forte présence sur le virtuel et la faible mobilisation sur le terrain découle-t-il des arrestations?  

« Des hommes politiques sénégalais et parfois même des étrangers tirent de plus en plus la sonnette d’alarme demandant ainsi au peuple de sortir. Pas plus tard qu’hier, le Sénégal a renoué avec la violence occasionnant de nombreuses arrestations de manifestants, la mort d’étudiant et d’interpellations brutales de journalistes sur le terrain », constate notre interlocutrice.

Elle compare la protection dont bénéficie les leaders politiques et l’exposition des manifestants à la violence.  Ces derniers sont parfois arrêtés. 

« Ces politiciens sont souvent accompagnés de gardes du corps et au moins mouvement, ils rentrent dans leur voiture et partent. Ou-bien ils font tout  pour être  arrêtés par les forces de l’ordre. Pendant ce temps, le Sénégalais lambda  est laissé à lui-même », regrette-t-elle.

Sous le couvert de  l’anonymat, cette professionnelle des médias atteste que « les hommes politiques n’en valent pas la peine. Ils ne sont là que pour défendre leurs propres intérêts en sacrifiant à cet effet le peuple ».

La manifestation virtuelle prend malheureusement le dessus sur le terrain confirme Moussa Sarr. Devant son chantier, l’architecte dénonce ce qu’il qualifie de manipulation.

« Nous constatons beaucoup de manipulations sur les réseaux sociaux et parfois des gens retransmettent d’anciennes vidéos pour inciter les gens à sortir manifester alors qu’ils sont chez eux ou même à l’étranger.  Les jeunes sortent de moins en moins car ils sont découragés. Ce n’est pas parce qu’ils n’aiment pas le pays non, mais juste parce qu’ils sont dépassés par tout ce qui se passe » a-t-il déclaré.

Les générations et régimes diffèrent

« Le Sénégalais ne connaît pas la violence encore moins cette nouvelle génération qui ne sait pas ce que c’est le 23 juin entre autres dates historiques du Sénégal.  En plus « avec toutes ces morts et arrestations notés, ces trois dernières années, les parents ont peur du lendemain de leurs enfants », fait savoir Mr Sarr.

Les rassemblements du vendredi 09 février sont dans toutes les lèvres. Dans cette grande place située devant la station Total, des quadragénaires haussent le ton, maudissent le régime en place et les appels à la violence virtuelle. Massata Ndoye est l’un d’eux.

« Nous en 2012 on était dans la rue pour affronter Abdoulaye Wade. Il  est un humain et aime son peuple comparé à l’actuel Chef de l’Etat. Ce qui est dommage. Aujourd’hui, toutes ces personnes qui appellent à manifester ne descendent jamais dans la rue. Les gens sont fatigués par les politiciens. Les manifestations ne règlent plus rien. Nous sommes face à un gars têtu. Surtout qu’on sait que les politiques peuvent se réconcilier à tout moment. La plupart des hommes  qui appellent à manifester ne sortent jamais », a constaté le pêcheur.

L’autre fait, lors de ces manifestations, ce sont surtout les jeunes qui sont arrêtés et non les hommes politiques. Les arrestations des manifestants au cours de ces trois dernières années pourraient émousser l’ardeur des Sénégalais à investir des rues pour protester. « Beaucoup de jeunes ont été arrêtés lors des dernières manifestations au moment où les hommes politiques sont libres. La population est maintenant consciente de cela. Elle s’est réveillée.  Aujourd’hui, ajoute-t-il « entre les dépenses quotidiennes et les charges de la vie, les gens ont d’autres préoccupations, d’autant plus que les arrestations sont devenues récurrentes », dit le père de famille avec consternation.   

Au Sénégal, les manifestations sont devenues plus virtuelles que réelles, selon nos interlocuteurs. Pour beaucoup, les populations semblent en avoir marre des politiques, des manipulations.

Souare Mansour

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