Tout savoir sur Abdoulaye Sylla, nouvel arbitre du jeu électoral
L’inspecteur général d’État de classe exceptionnelle, Abdoulaye Sylla a été nommé hier président de la CENA en remplacement de Doudou Ndir. Coup de projecteur sur le nouveau maître du jeu électoral.
Le décret présidentiel a épousé les formes dévastatrices d’un élagage à la faucheuse. À la Commission électorale nationale autonome (CENA), ce vendredi 3 novembre 2023, toutes les ‘’têtes’’ sont tombées. Celle du président, Doudou Ndir en premier. A peine a-t-il hoché la sienne en signe d’approbation de la décision du juge Sabassy Faye de réintégrer l’opposant Ousmane Sonko sur les listes électorales, que le sabre présidentiel s’abattit comme un couperet sur toute l’institution qu’il dirigeait jusque-là.
« Le Président de la République a nommé, par décret
n° 2023- 2152 du 03 novembre 2023, les nouveaux membres de la
Commission Électorale nationale Autonome (CENA), à l’expiration des
mandats des membres sortants », informe dans un communiqué, le
secrétaire général à la présidence de la République. Ce dernier
d’ajouter : « le Chef de l’État a, par ailleurs, nommé Monsieur
Abdoulaye SYLLA, Inspecteur général d’État à la retraite, et Monsieur
Ndary TOURE, Magistrat à la retraite, respectivement Président et
Vice-Président de la Commission Électorale nationale Autonome (CENA) ».
La
messe est donc dite. Doudou Ndir et Cie sur qui le rideau est
définitivement tombé, semblent payer cash leur injonction à la DGE. Pour
plusieurs Sénégalais abasourdis par la nouvelle, le timing est pour le
moins intrigant. Puisque ces 12 arbitres du jeu électoral sénégalais
étaient maintenus en poste par le président Sall alors qu’ils avaient
épuisé leur mandat (de 6 ans) depuis 2015. Ceci, en dépit des hoquets
rageurs éructés par la société civile et l’opposition notamment la
coalition Yewwi Askan Wi qui a longtemps demandé, en vain, la nomination
de nouveaux membres à la CENA.
«Depuis
2011, la Cena, qui est censée superviser et contrôler les élections,
est présidée de façon illégale par un magistrat à la retraite. La Loi de
2005, portant création de la Cena, dans son article 6, précise que
quand un membre de la Cena est définitivement indisponible, il doit être
remplacé. Et le nouveau membre devra achever son mandat. Doudou Ndir
qui avait remplacé Moustapha Touré a terminé son mandat depuis le 31 mai
2015», dénonçait Yewwi Askan Wi en décembre 2021.
Abdoulaye Sylla et le défi de l’adaptation express
Elle
tient maintenant son nouvel arbitre, en la personne de l’Inspecteur
général d’État (Ige) de classe exceptionnelle, Abdoulaye Sylla qui
hérite du ‘’sifflet’’ en plein match. Le nouveau président de la CENA a
la lourde tâche de mener à bien un processus électoral électrique et
émaillé de tensions, à trois mois de la présidentielle du 25 février
2024. Celui-ci est miné par le bras de fer -loin d’être terminé- entre
Ousmane Sonko et la Direction général des élections (Dge).
Il
est attendu de cet administrateur civil, juge au Conseil
Constitutionnel depuis 2018, dans un temps record, d’arrondir les angles
entre les différents acteurs afin de sauver un processus déjà vicié.
Ainsi, le premier défi du remplaçant de Doudou Ndir sera de prendre la
pleine mesure de ses nouvelles charges en mode fast-track et d’agir de
sorte à gagner la confiance des acteurs dont la majorité doute de la
transparence du processus. Comme l’exige la mission de la CENA, M. Sylla
devra illico s’atteler à faire « respecter la loi électorale de manière
à assurer la régularité, la transparence, la sincérité des scrutins en
garantissant aux électeurs, ainsi qu’aux candidats en présence, le libre
exercice de leurs droits ».
Parcours élogieux
L’ancien
président de l’Autorité de régulation des marchés publics (Armp) de
2011 à 2013 hérite certes d’un poste très sensible surtout dans un
contexte chargé et peu enviable, mais la mission est largement dans ses
cordes. Du moins eu égard à son parcours assez élogieux. En effet,
titulaire d’un diplôme d’ingénieur des travaux d’aménagement du
territoire, d’un autre de l’ancienne École Nationale d’Économie
appliquée (ENEA), Abdoulaye Sylla est un administrateur civil breveté de
l’École Nationale d’Administration (ENA) dont il participera plus tard à
la réforme en présidant le Comité de pilotage.
L’Ige,
Abdoulaye Sylla a été inspecteur des affaires administratives et
financières du ministère de la modernisation de l’État (1995-1996). Puis
secrétaire général de la Région de Kolda (1997-1999) avant d’être promu
directeur de cabinet du ministre de l’aménagement du territoire et de
la décentralisation (2000-2001). Il atterrit par la suite à la primature
où il est d’abord nommé Chef du Bureau de suivi et de coordination des
inspections internes des ministres (2004-2011) puis Conseiller technique
du premier ministre (2005-2013).
Un
Cv balèze mais qui ne suffit pas pour atteindre l’objectif qui est de
ne point désappointer les attentes des différents acteurs du jeu
électoral. Sa réussite dépendra bien évidemment de sa capacité à faire
taire les clivages. Ce qui relève d’une sacrée prouesse.