Guinée: Doumbouya réquisitionne l’armée face aux manifs et menace d’appliquer la loi antiterroriste
La junte au pouvoir en Guinée a annoncé réquisitionner l’armée face à de nouvelles manifestations de l’opposition prévues mercredi et jeudi, et a menacé d’appliquer les lois antiterroristes prévoyant jusqu’à la prison à vie contre les responsables d’une « situation de crise ».
Le
ministre de l’Administration du territoire, Mory Condé, a affirmé mardi
soir dans un communiqué lu à la télévision nationale que les
manifestations de l’opposition sont l’occasion d’une « véritable guérilla
urbaine » où les manifestants, « avec une violence inouïe, font régner la
terreur » et s’en prennent aux forces de sécurité avec des « moyens
létaux ».
« Nous
avons pris la responsabilité légale par réquisition (…) en date du 15
mai 2023 de solliciter le concours des forces armées pour appuyer les
forces de police et de la gendarmerie qui étaient en difficulté (pour)
maintenir et rétablir l’ordre public », dit le communiqué.
Le
ministre brandit la menace d’appliquer les lois antiterroristes qui
prévoient la réclusion perpétuelle contre quiconque commet un acte
mettant en danger la vie ou les libertés d’autrui avec l’intention
« d’intimider, provoquer une situation de terreur, créer un sentiment
d’insécurité au sein des populations », exercer des pressions sur l’Etat
ou créer « une situation de crise au sein des populations », selon les
articles du code pénal lus à la télévision.
La loi s’applique à quiconque commandite, finance ou encourage de tels actes, disent les textes.
La
Guinée est dirigée par une junte qui a pris le pouvoir par la force en
septembre 2021 sous la conduite du colonel Mamady Doumbouya.
Les
militaires ont consenti sous pression internationale à rendre la place à
des civils élus d’ici à fin 2024, le temps de mener de profondes
réformes, disent-ils.
La
junte a fait arrêter un certain nombre de dirigeants de l’opposition et
lancé des poursuites judiciaires contre d’autres. Elle interdit toute
manifestation depuis 2022.
L’opposition
dénonce la conduite autoritaire et exclusive selon elle de la période
dite de transition censée précéder le retour des civils. Les tentatives
de dialogue et la récente médiation de leaders religieux ont échoué.
L’opposition
a appelé à manifester mercredi et jeudi pour réclamer l’arrêt des
poursuites judiciaires « fantaisistes », le rétablissement du droit de
manifester et l’ouverture d’un vrai dialogue sous la présidence de la
Communauté des Etats ouest-africains.
De
précédentes manifestations ont fait plusieurs morts civils. Dans un
pays coutumier des violences politiques et longtemps dirigé par des
régimes autocratiques, les forces de sécurité sont de longue date
accusées par les défenseurs des droits humains d’usage excessif de la
force et d’impunité.
Le
ministre de l’Administration du territoire impute, lui, la
responsabilité des violences commises lors des manifestations sous la
junte à « certains individus à partir de l’étranger (…) avec le
concours de certains acteurs politiques ». Il ne précise pas son propos.
L’ancien
président Alpha Condé, renversé en 2021, ou encore le leader
d’opposition Cellou Dalein Diallo, parmi d’autres, sont à l’étranger
depuis plusieurs mois.