Mali: l’Etat Islamique aurait massacré des centaines de villageois
Des groupes armés
affiliés à l’organisation Etat islamique ont massacré des centaines de
villageois depuis le début de l’année dans le nord-est du Mali de
manière apparemment systématique, et les autorités n’en font pas assez
pour protéger les civils, alerte Human Rights Watch (HRW) jeudi.
Des
dizaines de milliers de villageois ont été poussés à fuir ailleurs au
Mali ou vers le Niger voisin après avoir perdu leur bétail et tous leurs
biens dans ces attaques commises depuis mars dans les régions de Ménaka
et Gao, dit l’organisation de défense des droits de l’Homme dans un
rapport.
Elle
souligne que les exactions ont en grande partie visé les Daoussahak,
une tribu touarègue. Elle souligne aussi que de vastes pans de
territoire sont passés sous la coupe des groupes affiliés à
l’organisation Etat islamique au grand Sahara (EIGS).
Les
jihadistes « ont mené des attaques terrifiantes et apparemment
coordonnées contre des villages, massacrant des civils, pillant des
maisons et détruisant des biens », dit HRW.
« Le
gouvernement malien devrait faire davantage pour protéger les
villageois particulièrement exposés aux risques d’attaques, et leur
fournir une plus grande assistance », déclare une responsable de HRW,
Jehanne Henry, citée dans un communiqué.
Ces
propos contredisent ceux des militaires qui ont pris le pouvoir par la
force en 2020 dans ce pays secoué depuis 2012 par la violence et la
propagation jihadiste. Les autorités maliennes se sont détournées depuis
un an de l’allié français et de ses partenaires, et tournées vers la
Russie. Elles répètent avoir inversé la tendance sécuritaire et avoir
mis en débandade les groupes jihadistes.
Mercredi
la sous-secrétaire d’Etat américaine Victoria Nuland, de retour du
Sahel, avait déclaré que la sécurité s’était considérablement détériorée
au Mali depuis que la junte a fait appel, selon les Etats-Unis et leurs
alliés, aux mercenaires de la société russe Wagner en 2021.
– Zone d’action élargie –HRW
détaille, témoignages à l’appui, des attaques dans treize localités
suivant un modus operandi similaire. A Inkalafane (région de Ménaka) le
28 mars, « un important groupe d’hommes armés est arrivé dans un véhicule
armé et à moto ». Ils ont tué 35 civils, raconte un berger de 55 ans.
La
situation sécuritaire s’est largement détériorée depuis huit mois dans
les régions de Ménaka et Gao suite à une offensive de l’EIGS au-delà de
ce qui était alors sa zone d’action et d’influence.
Les
jihadistes ont d’abord pris d’assaut l’immense et désertique région de
Ménaka en mars et avril. L’EIGS a ensuite dirigé son feu plus à l’ouest,
dans la région de Gao. Des attaques ont été signalées autour de la
capitale régionale, et pour la première fois une localité d’importance,
Talataye, a été prise d’assaut et temporairement contrôlée par l’EIGS en
septembre.
HRW
écrit que cette flambée de violence coïncide avec le retrait du Mali de
la force antijihadiste française Barkhane, poussée au départ par la
junte.
Etablir
des bilans précis des victimes de ces assauts est extrêmement difficile
en l’absence de remontées d’informations fiables en provenance de
territoires largement inaccessibles.
La
mission de l’ONU au Mali (Minusma) devrait quant à elle « intensifier
ses patrouilles, ses vols de dissuasion et ses interactions avec les
communautés touchées », dit HRW. La Minusma se plaint des entraves mises
par les autorités maliennes à ses opérations.