Hôpital Le Dantec, Immobilier de l’Etat, mensonges et manipulations (Par Abdou Karim FOFANA)
La démocratie est fragilisée quand les faits
eux-mêmes viennent à être contestés, tronqués, ignorés par les
manipulations, les mensonges, les falsifications.(François Hollande, discours à Crolles le 18 Mars 2017.)
On
savait qu’entre le mensonge, la manipulation et la politique il y avait
la possibilité d’un compagnonnage qui aboutit souvent à des situations
ubuesques lorsque la brume se dissipe.
On
savait aussi que la démocratie quant à elle ne s’accommode jamais de
ces deux gangrènes qui l’essoufflent, l’étouffent et la tuent.
Mais
on ne savait pas que dans notre jeu politique au Sénégal, elles
s’installeraient l’air de rien, avec aisance et s’érigeraient en mode de
conquête du pouvoir.
Elles
sont organisées avec des acteurs dont les rôles sont bien définis et
partagés: d’une part les Hommes politiques assumés et partisans et
d’autre part des chroniqueurs qui n’assument pas leur appartenance
politique mais profitent de leur statut de « neutralité » pour faire
passer leurs positions partisanes.
Le
débat sur la reconstruction de l’hôpital Aristide Le dantec nous a
encore rappelé l’incapacité de certains acteurs politiques de
l’opposition à tenir un débat public serein et constructif sans
mensonges et manipulations.
Guy
Marius Sagna député élu a interpellé la majorité sur la cession d’une
partie du foncier abritant l’HALD, avec des suppositions sans fondement
sur le prix et les modalités de cessions.
Malgré
les mises en garde et les éclaircissements du DG du Fonsis dans son
interview accordée à L’observateur du Mardi 16 Août 2022, le député
fraîchement élu ne recule devant rien pour tronquer les faits et
manipuler l’opinion.
Morceau
choisi : « peuple sénégalais, on nous a dit qu’il allait vendre 30.000
m2 de l’HALD à 1 million de francs CFA le m2 alors que la valeur réelle
dans cette zone est de 2,5 millions de francs CFA le m2 ».
Les spécialistes de l’immobilier jugeront eux-mêmes de la qualité de l’assertion de notre « très honorable député ».
Ce
qui est constant est que malgré la valeur élevée du foncier dans cette
zone du plateau, aucun terrain non bâti ou terrain abritant des
bâtiments vétustes n’a jamais dépassé un prix de cession de 1,5 million
de francs CFA.
Encore
mieux, les appartements de haute finition (produit immobilier bâti)
dans cette zone qui sont les surfaces les plus chères au m2 sur notre
territoire national n’ont jamais dépassés 2 millions de francs CFA le
m2.
En
outre, le DG du Fonsis a indiqué dans l’interview évoquée ci-dessus : «
Le foncier de l’hôpital Le dantec ne sera pas vendu à moins d’un
million de francs CFA le m2 », ce qui signifie en français simple que le
montant au m2 annoncé est une mise à prix (le prix le plus bas auquel
le bien pourra être vendu).
Enfin
il nous renseigne que le foncier n’a pas encore été vendu à ce jour et
que seul un comité restreint créé à cet effet a connaissance des offres
publiques d’achat déposées à la suite d’une procédure d’appel d’offre
publiée dans les médias.
Quoi de plus transparent !
Aussi,
il faut noter que lorsque 3 hectares sont vendus, il existe de très
fortes chances que cette surface foncière fasse l’objet d’un lotissement
dans lequel selon les options d’aménagement l’acquéreur perdrait 30 %
de la surface entre voirie (15% au minimum) et zone d’équipement (
Ecole, jardin, infrastructures de santé, sport, équipement marchand,
etc…15% minimum) à reverser aux collectivités publiques (État et
communes) conformément au code de l’urbanisme.
Au
final, l’acquéreur ne se retrouvera qu’avec 21.000m2 de surface
constructible sans compter une servitude due à la proximité avec
l’hôpital Aristide Le dantec reconstruit.
Mais tout cela semble être compliqué et bien éloigné des préoccupations de Guy Marius Sagna.
L’autre
déclaration est celle d’Ousmane Sonko qui affirme encore que le
patrimoine immobilier de l’État aurait été vendu, faisant sans doute
allusion aux baux à valorisation qui ont été développés par l’Agence de
gestion du patrimoine bâti de l’Etat pour moderniser et développer ses
actifs sans engager des dépenses publiques.
Malgré
la réponse qui lui a été servie à la suite d’une question écrite au
gouvernement en 2020 à l’Assemblée nationale, il persiste dans la
manipulation pour orienter le débat et falsifier la vérité.
En
effet, ce schéma de valorisation est loin de l’approche archaïque que
ce dernier a de la gestion publique en matière immobilière. Cette
innovation permet aux collectivités publiques de donner mandat à un
promoteur privé ou public de développer un projet immobilier sur un site
appartenant à l’Etat en dehors de toute cession et de se partager avec
l’Etat le produit dudit développement immobilier sur une durée
d’exploitation définie entre les deux parties sans dépasser les
prescriptions du code du domaine de l’Etat.
Aucun
cadeau ou aucune faveur ne sont faits aux promoteurs, car ces derniers
ont l’obligation de construire sur une partie de ladite assiette un
bâtiment pour l’Etat et un autre sur l’autre partie pour leurs usages
ou exploitations propres à remettre dans le patrimoine public à la fin
de la durée prévue du contrat de bail.
Méconnaître
cela serait tolérable pour un anarchiste comme Guy Marius Sagna, mais
inacceptable pour un inspecteur des impôts et domaines.
Sans
doute, Ousmane Sonko refusera de débattre avec moi sur le sujet, comme
il évite les échanges avec les journalistes depuis 2020 et surtout mes
questions sur les 1400 parcelles de terrains reçues par son syndicat
depuis 2006 dans la région de Dakar.
Sans
doute, il se rendra compte un jour que ce schéma est innovant pour le
développement du patrimoine immobilier public et économe en dépense
publique.
Sans
doute, il cherchera à l’utiliser pour la commune de Ziguinchor afin de
moderniser et de développer le patrimoine immobilier communal mais sans
l’honnêteté, ni l’humilité de remercier le Président Macky Sall pour
cette solution innovante et peu coûteuse.
La
fragilisation de la démocratie est le fruit de toutes ces tentatives de
contrôle, de manipulation, d’exagération de l’information pour aboutir à
une subversion et créer un sentiment de révolte et d’injustice, mais
comme l’a dit l’adage celui qui vainc par le mensonge et la manipulation
périra par le mensonge et la manipulation.
On
se rappelle l’exemple d’un Chef d’Etat qui par la manipulation des
réseaux sociaux a réussi à convaincre une partie aveuglée de sa
population de « sa victoire volée » à la présidentielle, s’en suivit une
attaque violente de leur parlement par ses militants qui s’est soldée
par la mort de 4 personnes, 100 policiers blessés et une quinzaine
hospitalisés.
Chez nous, le mensonge et la manipulation politiques ont déjà fait 17 morts entre 2021 et 2022. Abdou Karim FOFANA Ancien DG de l’Agence de gestion du patrimoine bâti de l’Etat;Ancien ministre de l’Urbanisme, du Logement et de l’Hygiène publique;Ministre auprès du Président de la République en charge du suivi du PSE.