À rebrousse-poil : Macky Sall-Emmanuel Macron, même combat ! (Par Adama Ndiaye)
Lors des dernières locales, le Président de la République a subi quelques revers emblématiques dans l’agglomération dakaroise, mais aussi à Thiès, Ziguinchor et Kaolack. Même si les pontes de sa coalition ont tenté de minimiser l’ampleur du désastre en revendiquant, chiffres à l’appui, la victoire globale lors de ce scrutin, le sentiment général demeurait que la camp présidentiel était sorti affaibli de cette séquence. Les actes que pose le Président de la République le confirment, d’ailleurs. Tout d’abord, il a eu la bonne idée de lancer l’initiative Jokko Ak Macky pour être mieux au fait des aspirations des Sénégalais et des Sénégalaises. Malheureusement, Macky Sall ne serait pas Macky Sall s’il ne cédait à ses déplorables tactiques politiciennes. Ainsi pour reconquérir le terrain perdu, il est allé ouvertement à la chasse des nouveaux maires de l’opposition dans l’espoir de les empiler dans sa besace. Il a eu quelques belles prises, du reste. Casser la dynamique de l’opposition, la diviser et la réduire comme peau de chagrin est l’option prise par Macky Sall pour s’assurer des lendemains électoraux qui chantent.
Cette stratégie, d’ailleurs, a quelques similitudes avec celle adoptée par Emmanuel Macron en France. Lors de la dernière élection présidentielle française, les candidats du Parti Socialiste et de Les Républicains, n’ont pas recueilli, leurs suffrages cumulés, 5% des votes. Au-delà des limites personnelles de leurs candidates, Anne Hidalgo et Valérie Pécresse, ces formations historiques sont d’abord victimes de la véritable OPA qu’a menée Macron dans leurs rangs. Beaucoup d’anciens cadres de la gauche et de la droite de gouvernement garnissent les rangs d’En Marche. À gauche : Jean-Yves Le Drian, Gérard Collomb (qui fut son ministre de l’Intérieur), Annick Girardin, Christophe Castaner, sans parler des soutiens de Manuel Valls et de Bertrand Delanoë ; À droite : Gérard Darmanin, Bruno Le Maire, Édouard Philippe (qui fut son Premier ministre).
En rassemblant les modérés des deux camps, Macron, qui vient d’être réélu, s’est assuré d’avoir toujours en face de lui l’opposition la plus radicale incarnée à droite par Éric Zemmour et Marine Le Pen, et à gauche par Jean Luc Mélenchon. Stratégie payante à court terme, mais dangereuse sur le temps long puisque les électeurs n’auront plus que le vote “populiste” pour contrer ce qu’ils appellent le “système”, c’est-à-dire la caste des partis politiques traditionnels.
En domestiquant le PS, l’AFP, et quasiment tous les partis de gauche, en absorbant ce qui restait du Parti démocratique sénégalais, et en pêchant à gauche et à droite dans l’opposition, Macky Sall, lui aussi, nous condamne à des choix mortifères : lui ou l’opposition la plus radicale.
Certains s’inquiètent, à juste titre, de l’entrée sur la scène politique de personnalités aux idées extrêmes et qui constituent un défi inédit pour notre démocratie. Le modèle laïc sénégalais, les avancées progressistes acquises sont remises en cause, comme jamais auparavant. Mais ces gens ne prospèrent que sur le terrain laissé en jachère par une réelle force d’opposition crédible et raisonnable.
Heureusement avec la nouvelle coalition Aar Sénégal, une troisième voix émerge.