En Tunisie, la police ferme le siège du Conseil supérieur de la magistrature
Le siège du Conseil supérieur de
la magistrature à Tunis a été encerclé par la police lundi, après la
décision du chef de l’État Kaïs Saïed de dissoudre cet organe de
supervision judiciaire. Son président, Youssef Bouzakher, a déploré une
mesure « illégale » et assuré que le Conseil « continuera(it) à exercer ses
fonctions ».
La
police tunisienne a fermé, lundi 7 février, le siège du Conseil
supérieur de la magistrature (CSM), une mesure jugée « illégale » par son
président, deux jours après sa dissolution sur une décision du chef de
l’État Kaïs Saïed.
« Des forces de la
police ont empêché lundi tout accès au siège du CSM », a déclaré à l’AFP
Youssef Bouzakher, le président de cet organe de supervision
judiciaire. Selon des journalistes de l’AFP sur place, le siège du CSM
était bien encerclé lundi matin par une force policière.
« Nous
ne savons pas qui a pris cette décision illégale mais la police
déployée a dit appliquer des instructions », a ajouté Youssef Bouzakher.
« Cette fermeture illégale et sans aucun motif juridique prouve que nous
avons atteint une étape dangereuse où le pouvoir exécutif s’empare des
institutions de l’État et de la magistrature en utilisant la force »,
a-t-il déploré.
« Danger »
Mettant
en garde contre « un danger contre la magistrature, les droits et les
libertés », Youssef Bouzakher a assuré que le CSM « continuera à exercer
ses fonctions ».
Le président Saied, qui s’est
arrogé les pleins-pouvoirs en juillet, a annoncé la dissolution du CSM,
organe qu’il accuse de partialité, dans la nuit de samedi à dimanche.
« En
décidant de dissoudre le CSM le président Saïed démontre sa
détermination à supprimer la dernière ligne de défense de son pouvoir
d’un seul homme en Tunisie : le pouvoir judiciaire », a indiqué la
Commission internationale de juristes (CIJ) dans un communiqué publié
lundi. Pour cette organisation, la communauté internationale « ne doit
pas fermer les yeux sur cette dernière atteinte à l’État de droit et
doit exhorter le président au retour à l’ordre constitutionnel en
Tunisie ».
Le CSM, instance
indépendante créé en 2016 pour nommer les juges, est composé de 45
magistrats, pour les deux tiers élus par le Parlement et qui désignent
eux-mêmes le tiers restant.
L’UE « préoccupée »
Kaïs
Saïed a assuré lundi qu’il n’avait aucune intention d’interférer dans
le fonctionnement de la justice après la dissolution du CSM.
« Je
voudrais rassurer tout le monde en Tunisie et à l’étranger que je
m’ingérerai pas dans le travail de la justice et que j’ai recouru à
cette dissolution seulement parce qu’elle était devenue nécessaire »,
a-t-il dit en recevant la Première ministre Najla Bouden, selon une
vidéo de la rencontre diffusée par la présidence. « Je n’interviendrai
dans aucune affaire ou nomination », a-t-il ajouté, affirmant que le CSM
avait été instrumentalisé par certains « à des fins personnelles ou
politiques ».
L’Union européenne s’est dite
lundi « préoccupée » par la décision du président Saïed de dissoudre le
(CSM) et a insisté sur « l’importance de l’indépendance judiciaire ».