Didier Raoult devant la chambre disciplinaire de l’Ordre des médecins
Le controversé
professeur Didier Raoult, accusé d’avoir enfreint le code de déontologie
médicale en promouvant l’hydroxychloroquine contre le Covid-19, fait
face à ses pairs lors d’une audience disciplinaire qui s’est ouverte
vendredi matin à Bordeaux.
Veste
foncée, pull vert et chemise à carreaux, l’infectiologue de 69 ans a
pris place dans la salle d’audience de la cour administrative d’appel de
Bordeaux pour être entendu par la chambre disciplinaire de l’Ordre des
médecins de Nouvelle-Aquitaine, une audience dépaysée loin de Marseille
pour examiner notamment deux plaintes qui le visent.
En
arrivant, le Pr Raoult avait gardé le silence, se contentant d’un signe
de tête devant la trentaine de manifestants venus le soutenir et
l’applaudir. “Raoult, notre phare dans la nuit”, “Touche pas à mon
Raoult”: des banderoles témoignaient de la popularité du médecin auprès
des “anti-système” qui scandaient “liberté” ou “vous n’êtes pas seul”.
“C’est
un homme extraordinaire”, “le plus compétent de France. Il est intègre”
car “il dénonce les conflits d’intérêts d’autres collègues”, assurait
Françoise Le, 60 ans, se présentant comme médecin en Ehpad dans
l’agglomération bordelaise. “Je suis extrêmement déçue de l’Ordre des
médecins”.
À
l’automne 2020, le conseil départemental de l’Ordre des médecins des
Bouches-du-Rhône avait engagé des poursuites contre Didier Raoult
directeur de l’Institut hospitalo-universitaire Méditerranée Infection
(IHU) à Marseille.
Il
lui reprochait plusieurs entorses au code de déontologie – notamment un
manque au devoir de confraternité et l’utilisation de traitements non
validés – liées à la promotion de l’hydroxychloroquine contre le
Covid-19.
Le
Conseil national de l’Ordre des médecins (Cnom) s’était associé à ces
poursuites en déposant à son tour une plainte fin décembre.
“Réseaux sociaux et plateaux télés”Selon
Me Philippe Carlini, avocat du conseil de l’Ordre des médecins des
Bouches-du-Rhône, qui évoque des entorses à “9 ou 10 articles du code de
déontologie”, le Pr Raoult a eu des attitudes “anti-confraternelles”
envers “les médecins qui ne pensent pas comme lui” lors de ses
nombreuses communications “sur les réseaux sociaux et les plateaux
télés”.
Ces
poursuites ne constituent “pas un règlement de compte” mais “un soutien
à tous les médecins libéraux, en première ligne pendant la crise,
complètement déstabilisés par des positions agressives de patients qui
exigeaient de l’hydroxycholoroquine”, a expliqué Me Carlini à l’AFP la
veille de l’audience.
Pour
Me Fabrice Di Vizio, qui assure la défense de Didier Raoult, les
plaignants dénoncent “une communication générale” mais le dossier ne
comporte aucun propos “précis, factuel, daté” montrant que le professeur
marseillais “déconsidère la profession”.
La
chambre disciplinaire, présidée par un magistrat administratif, peut
décider de sanctions contre l’infectiologue marseillais allant d’un
simple avertissement à une radiation, en passant par une suspension
temporaire.
Elle doit prononcer sa décision entre 15 jours et huit semaines après l’audience.
Plainte de Didier RaoultLa
juridiction bordelaise doit examiner également une troisième plainte
déposée cette fois par le professeur marseillais lui-même, contre le
vice-président de l’Ordre des médecins des Bouches-du-Rhône, le Dr
Guillaume Gorincour, pour “non-confraternité”.
Didier
Raoult reproche à ce médecin chargé de la déontologie au sein de
l’instance, une cinquantaine de tweets le dénigrant, postés au long de
l’année 2020.
L’infectiologue
et l’Institut hospitalo-universitaire (IHU) de Marseille ont acquis une
vaste et controversée notoriété avec la pandémie de Covid-19, en
promouvant un traitement contre la maladie à base d’hydroxychloroquine,
malgré l’absence aujourd’hui encore d’effet prouvé.
Plusieurs
études réalisées par l’IHU pour appuyer l’intérêt de ce traitement ont
été fustigées par de nombreux scientifiques pour leur méthodologie et
leurs conditions de réalisation.
Depuis
la fin octobre, cet institut et son directeur sont également accusés
d’avoir mené depuis 2017 de supposés “essais cliniques” illégaux contre
la tuberculose, ce qu’ils nient.
Le
Pr Raoult, à la retraite comme professeur d’université praticien
hospitalier, doit quitter la tête de l’IHU au plus tard fin juin.
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