Le prix Nobel de littérature décerné au romancier tanzanien Abdulrazak Gurnah: “J’ai cru à une blague”
Le Nobel de littérature
a été décerné ce jeudi au romancier tanzanien Abdulrazak Gurnah,
premier auteur noir à recevoir la plus prestigieuse des récompenses
littéraires depuis 1993.L’auteur,
connu notamment pour son roman “Paradise”, a été récompensé pour son
récit “empathique et sans compromis des effets du colonialisme et le
destin des réfugiés pris entre les cultures et les continents”, selon le
jury.Né à ZanzibarNé
en 1948 à Zanzibar, qu’il a fui en 1968 à un moment où la minorité
musulmane était persécutée, Abdulrazak Gurnah a publié une dizaine
d’ouvrages depuis 1987. Il vit aujourd’hui au Royaume-Uni. Son œuvre
s’éloigne des “descriptions stéréotypiques et ouvre notre regard à une
Afrique de l’Est diverse culturellement qui est mal connue dans de
nombreuses parties du monde”, a expliqué le jury.
Les “réfugiés ne viennent pas les mains vides”Lors
de sa première interview à la Fondation Nobel, le lauréat a appelé
l’Europe à changer de point de vue sur les réfugiés d’Afrique et la
crise migratoire. “Beaucoup de ces gens qui viennent, viennent par
nécessité, et aussi franchement parce qu’ils ont quelque chose à donner.
Ils ne viennent pas les mains vides”, a affirmé l’écrivain, soulignant
qu’il s’agissait “de gens talentueux et pleins d’énergie”.
“J’ai cru à une blague”Ce
prix est une surprise et de nombreux critiques et éditeurs confessent
qu’ils ne connaissaient pas l’écrivain, absent de la liste des
pronostics, même comme simple outsider. Son propre éditeur en Suède,
Henrik Celander, a expliqué à la presse suédoise qu’il n’aurait jamais
imaginé qu’il décroche le Graal littéraire. Quand l’Académie suédoise a
appelé, “j’ai cru à une blague”, a pour sa part confié Abdulrazak
Gurnah.
Élargir les horizonsL’an
passé, la poétesse américaine Louise Glück avait été sacrée par la plus
célèbre des récompenses littéraires pour son œuvre “à la beauté
austère”. Cette année, les conjectures ont beaucoup tourné autour de la
promesse de l’Académie d’élargir ses horizons géographiques. Même si le
président du comité Nobel Anders Olsson avait pris soin de réaffirmer en
début de semaine que le “mérite littéraire” restait “le critère absolu
et unique”.
Prix très “occidental”Le
prix est historiquement très occidental et depuis 2012 et le Chinois Mo
Yan, seuls des Européens ou des Nord-Américains avaient été sacrés. Sur
les 117 précédents lauréats en littérature depuis la création des prix
en 1901, 95, soit plus de 80% sont des Européens ou des Nord-Américains.
Avec le prix 2021, ils sont 102 hommes au palmarès pour 16 femmes.
Délibérations secrètesSur
les quelque 200 à 300 candidatures soumises bon an mal an à l’Académie,
cinq sont retenues avant l’été. Les membres du jury sont chargés de les
lire attentivement et discrètement avant le choix final peu avant
l’annonce. Les délibérations restent secrètes pendant 50 ans.
Après
les sciences en début de semaine, la saison Nobel se poursuit vendredi à
Oslo avec la paix, pour s’achever lundi avec l’économie.