PRÉSIDENTIELLE EN GUINÉE : La candidature de Cellou Dalein est-elle une équation ou une adéquation ?
La candidature annoncée et assumée de Cellou Dalein Diallo, à l’élection présidentielle du 18 octobre 2020, a produit l’effet d’un roulement de tonnerre sans fin, dans le ciel politique de la Guinée chroniquement assombri par une nuée de difficultés. Les arguments en faveur et les avis en défaveur de la candidature résonnent de sens par-ci, ruissellent d’erreurs par-là.
Il
convient de préciser à l’endroit des uns et des autres (ceux qui
approuvent avec ferveur la candidature, comme ceux qui la désapprouvent
avec frénésie) que les vérités d’ordre politique ne sont ni bibliques ni
coraniques. Car, en effet, le combat politique – ayant pour finalité,
la conquête du pouvoir – n’est jamais rectiligne dans sa double
dimension stratégique et tactique. A ce propos, Lénine disait : « La
Révolution n’est pas la perspective Nevski ». Allusion à l’avenue de 45
kilomètres la plus droite de la ville de Saint-Pétersbourg rebaptisée
Leningrad.
L’expérience monumentale du monumental Abdoulaye Wade en est une
nette illustration. Politicien doué et roué, opposant coriace et
increvable, Abdoulaye Wade a toujours fait la navette entre la rue et
les urnes – avec quelques escales en prison – jusqu’au succès du 19 mars
2000. Durant tout son long et rude combat politique, l’adversaire
successif des Présidents Léopold Senghor et Abdou Diouf, n’a jamais
boycotté une élection ; hormis les communales de 1996. Bref, l’ancien
Président sénégalais a démontré éloquemment que la rue et les urnes ne
sont pas forcément antinomiques. Donc, vivement l’alliage de la rigidité
opportune et de la flexibilité nécessaire !
Au demeurant, la pertinence de la combinaison du moyen de pression
(la rue) et du moyen de triomphe (le vote) est administrée par le
parcours des Partis communistes d’Europe occidentale. Singulièrement,
les imposants Partis communistes français et italien qui sont
constamment allés aux élections, tantôt en solo, tantôt en tandem avec
leurs cousins socialistes. Une expérience française qui a culminé, en
1981, avec la victoire d’un François Mitterrand épaulé par les
communistes.
Comme quoi, le FNDC fait preuve de myopie politique en laissant
Cellou Dalein, seul, face à Alpha Condé. Pourtant, le leader et candidat
de l’UFDG ne fait que traduire ou appliquer le bréviaire de tout
opposant avisé : contester, combattre et concourir. Baptisons ce
bréviaire : les 3 C. Contester Alpha, combattre Alpha et concourir au
suffrage universel avec Alpha, pour in fine, balayer Alpha. Comme on le
voit, ces trois gestes-là sont compatibles. C’est d’autant plus vrai que
l’élection présidentielle n’est pas assimilable à l’élection d’un
député. Dans la première, les opinions les plus diverses peuvent se
réunir et se fixer dans un intérêt commun et supérieur à tous les
autres…intérêts. Pardonnez la répétition !
En définitive, ceux qui pointent les « contradictions » ou soulignent
les « incohérences » de Cellou Dalein Diallo, doivent se convaincre que
la politique de la chaise vide mène précisément vers un futur vide de
toute possibilité de changement. Ou alors, que les contempteurs de
Cellou Dalein et les procureurs de sa candidature déclinent une
alternative valable, en dehors du simple et stérile boycott !
En vérité, l’équation fâcheusement créée par l’Empereur au petit
pied, le Samory au rabais et le Sékou Touré sans charisme ni panache
(j’ai nommé Alpha Condé) renvoie à une alternative à deux termes : le
choix démentiel de la guerre civile en Guinée, choix exclu par les
Guinéens de tous bords qui aiment leur patrie. Il s’y ajoute que le
Président Alpha Condé et son État ont le monopole des armes et du feu :
bonjour le fatal génocide ! Ou bien alors l’option adéquate de la
compétition électorale qui est heureusement privilégiée par Cellou
Dalein Diallo. Même si – à propos de la présidentielle du 18 octobre
2020 – les dés sont pipés et les cartes biseautées. Toutefois, il faut
absolument tacler Alpha Condé dans la surface de réparation ! Sinon, il
marquera aisément un troisième but (mandat) et mourra dans les buts,
c’est-à-dire au pouvoir.
Par Babacar Justin Ndiaye