L’Afrique face à son destin dans un contexte post-Covid : Le rendez-vous de l’histoire (Par Amadou Ba)
La reconfiguration des relations
internationales est une donne incontournable avec la crise du
coronavirus. Frappé de plein fouet dans toutes ses dimensions, le monde
doit bien faire face à l’épreuve de la reconstruction de ses bases, de
la redéfinition de ses priorités et de la renégociation du pacte qui a
prévalu durant toute la période de l’après-guerre. Le nouvel ordre
mondial prôné par le Président Macky Sall n’est pas seulement légitime.
Il est un impératif et une urgence. Impératif d’un monde plus équitable,
il postule un repositionnement stratégique de l’Afrique dans les
relations internationales.
Le
Président sénégalais a, de façon permanente, posé la nécessité d’une
réforme du Conseil de sécurité des Nations unies. L’absence de l’Afrique
de ce « saint des saints » de l’agenda mondial est devenue proprement
un non-sens. Avec 1 milliard 200 millions d’habitants, l’Afrique
représente 17% de la population mondiale. A l’horizon 2100, ce taux est
projeté à 39%. Avec une Zone de libre-échange continentale africaine,
30% des réserves mondiales en pétrole, gaz et minéraux, 24% des terres
arables, plus de 9% des ressources en eau douce renouvelable, une
jeunesse qui représente plus de 70% de sa population, le continent est
bien l’avenir du monde. Pourvu que le monde change son regard et accepte
que la paix et la prospérité de tous sont intimement liées au progrès
en Afrique. C’est une urgence, comme l’a clairement posé le Président
sénégalais.
En
effet, la crise sanitaire provoquée par la Covid-19 est un révélateur
puissant des inégalités qui caractérisent l’ordre mondial et dont
l’Afrique est la principale victime. Toutefois, notre continent n’est
pas dans la posture du nécessiteux attendant passivement l’aide d’un
bienfaiteur. Dans la vision du Président Macky Sall, il est question de
bâtir ensemble des règles d’un partenariat mutuellement bénéfique dans
le respect dû aux uns et aux autres. La crise sanitaire en cours nous
enseigne que le destin de l’humanité est un et indivisible. Ce qui
touche la contrée la plus lointaine peut atteindre le monde entier avec
une vitesse insoupçonnée. Dans la culture sénégalaise, il est dit que «
l’homme est le remède de l’homme ». Cette sagesse est plus qu’actuelle
dans un monde rudement soumis à un ennemi invisible qui ne connaît pas
de frontières, ni âge, ni statut social. Voilà pourquoi le Président
sénégalais appelle à un monde solidaire, capable de mettre l’humain et
l’humanité au centre de ses finalités.
‘Afrique
est un acteur majeur et incontournable de ce monde nouveau qui se
dessine sous l’effet inattendu de la Covid-19. Elle pourra d’autant plus
jouer pleinement son rôle qu’elle a pris conscience, aujourd’hui, de sa
puissance lorsqu’elle renforce son unité pour faire face à l’épreuve.
Les nombreuses consultations et rencontres des instances communautaires
pour une riposte commune à la crise sanitaire, du niveau sous régional
au niveau continental, indiquent clairement que l’Afrique est déjà dans
l’après-Covid-19 pour participer activement à la naissance du nouvel
ordre mondial proposé par le Président sénégalais. L’appropriation de
son appel par l’Union Africaine et le G20 nous laisse confiant et très
optimiste quant aux opportunités réalistes de changement du paradigme
historique de domination et de dépendance au profit d’une nouvelle
solidarité plus agissante, d’une coopération plus effective et d’un
partenariat stratégique au service d’une humanité réunifiée pour faire
face aux menaces globales et d’un partage plus équitable des ressources
disponibles dans un contexte de mondialisation.
C’est
tout le sens de son plaidoyer pour l’annulation de la dette publique et
la restructuration de la dette privée des États africains dont il a
défendu la cause bien avant la COVID-19. En effet, ces arrangements
constitueraient une base pour la refondation des relations entre
l’Afrique et ses partenaires, tout en permettant au Continent d’aménager
des espaces budgétaires susceptibles de favoriser son développement.
Les ressources ainsi dégagées pourraient renforcer les efforts consentis
dans le cadre des investissements dans la lutte contre la pauvreté, le
chômage des jeunes et l’émigration clandestine qui font le lit de
l’instabilité sociale et, partant, de l’insécurité de l’Afrique et de
ses partenaires.
Les
nombreux échos favorables à cette perspective sont encourageants pour
l’Afrique et la communauté des nations. Fidèle à ses traditions
démocratiques, de paix et de solidarité, le Sénégal joue déjà sa
partition. A l’instar de tous les pays du continent, Il devra renégocier
sa place tout en s’appuyant sur les leçons apprises des contraintes
imposées par la Covid-19 pour renforcer sa résilience, réduire sa
dépendance dans la satisfaction des besoins fondamentaux de sa
population (sécurité humaine, santé, éducation, alimentation…), dénouer
les goulots d’étranglement économiques et financiers et accroître ses
investissements dans la prospective, la révolution numérique et la
recherche opérationnelle pour des réponses immédiates et endogènes á ses
préoccupations essentielles et au-delà, la reconquête du marché
mondial.
Amadou BAMinistre des Affaires Étrangèreset Des Sénégalais de l’Extérieur