Quelles stratégies face à l’épidémie de Covid-19?
Alors que l’Europe et l’Amérique du Nord font face au sommet de la vague épidémique, la Chine semble l’avoir passée et d’autres pays, comme la Corée du Sud, l’ont grandement limitée. Quelles sont les différentes mesures mises en place autour du monde pour faire face au SARS-CoV-2 ?
« Aplatir la courbe » : c’est désormais l’unique objectif des pays frappés par l’épidémie de Covid-19 ; limiter le plus possible le nombre de cas dans le temps pour que les moyens hospitaliers ne soient pas submergés par un afflux de patients. En Europe, mais également aux États-Unis, la solution passe alors par un confinement plus ou moins strict de la population et la mise en place de la distanciation sociale.
L’objectif est de casser la dynamique de propagation exponentielle du virus qui double le nombre de cas en quelques jours. Cette stratégie est néanmoins lourde de conséquences, des pays entiers sont paralysés et les conséquences économiques terribles. En France, on estime qu’un mois de confinement entraînera une baisse de 3 points du PIB.
«Un message simple à adresser à tous les pays : test, test, test»
Certains pays sont cependant parvenus à s’affranchir de cette étape. La Corée du Sud est à ce titre souvent citée en exemple. Le pays du matin calme a appliqué à la lettre la recommandation du patron de l’Organisation mondiale de la santé, le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus : « Nous avons un message simple à adresser à tous les pays : test, test, test. Tous les pays devraient pouvoir tester les cas suspects. Ils ne peuvent pas lutter contre la pandémie les yeux bandés ».
La Corée du Sud a ainsi testé 15 000 personnes gratuitement par jour en moyenne. Une stratégie qui ne se suffit cependant pas à elle-même : l’enjeu est alors d’isoler rapidement les personnes atteintes du Covid-19 et de retracer ensuite la chaîne de contamination afin d’identifier toutes les personnes en contact avec les malades. Il a notamment fallu pour cela la coopération des opérateurs téléphoniques avec le Centre de gestion de crise pour transmettre les données de géolocalisation des Sud-Coréens. Ce sont toutes ces mesures mises bout à bout, ainsi qu’un civisme rigoureux d’une population frappée auparavant par le MERS et le SRAS, d’autres pathologies respiratoires, et qui a respecté les mesures barrières et de distanciation sociale, qui ont permis à la Corée du Sud de ne pas avoir recours au confinement.
« L’épidémie de SRAS de 2002-2003 a fourni beaucoup de leçons », estime Benjamin Coling, professeur d’épidémiologie à l’université de Hong Kong. En plus de la Corée du Sud, Singapour, Taïwan et Hong Kong ont su ne pas répéter les erreurs du passé. « Au niveau collectif, ces pays sont parvenus à développer des capacités à détecter de nouveaux virus, tout en augmentant la capacité des hôpitaux à accueillir des patients en difficulté respiratoire. » Une expérience qui a également profité à la population au niveau individuel : « Le SRAS a préparé les gens à faire preuve d’un niveau considérable d’auto-discipline, à éviter les foules et à relever leur niveau d’hygiène personnelle. » En somme, « ces pays étaient bien mieux armés face à l’émergence de ce coronavirus que beaucoup d’autres. »
L’Europe désemparée
Peut-être parce qu’elle n’a pas été frappée récemment par de telles épidémies, la stratégie suivie en Europe a quant à elle différé. Avec en premier lieu la France, l’Espagne et l’Italie. Avec relativement peu de cas jusqu’à début mars, l’Hexagone a par exemple tenté de limiter au maximum l’épidémie avant que celle-ci ne flambe. La doctrine reposait alors sur des tests ciblés pour restreindre les quelques foyers épidémiques recensés sur le territoire en retraçant les chaînes de contamination. Un rassemblement évangélique à Mulhouse regroupant plus de 2 000 personnes a sonné le glas de cette stratégie. Plusieurs personnes contaminées y ont assisté et ont ensuite participé à la diffusion du virus dans tout le pays.
Cela dit, le choix français de ne pas recourir à un dépistage massif et de se contenter de tests ciblés n’a pas été délibéré. Comme le note le Conseil scientifique mis en place par Emmanuel Macron dans son avis du 23 mars : « l’alternative d’une politique de dépistage à grande échelle et d’isolement des personnes détectées n’est pas pour l’instant réalisable à l’échelle nationale ». En effet, même si elle l’avait voulu la France n’aurait pas pu généraliser le dépistage. Pour en réaliser un, on cherche à détecter la présence de virus dans les sécrétions nasales d’une personne. A cet effet, un praticien doit prélever un échantillon à l’aide d’un long coton-tige, un écouvillon. Ce prélèvement doit ensuite être envoyé dans un laboratoire, où on lui adjoint alors un réactif pour déterminer de la présence du virus. Mais les goulots d’étranglement sont nombreux le long de cette chaîne, et empêchent le pays de monter en cadence ; il ne réalisera que quelques centaines de tests par jour au début de l’épidémie pour parvenir ensuite à une moyenne de 4 000 tests quotidiens jusqu’à la mi-mars.
Pour la France comme de nombreux autres pays, ne reste alors que la distanciation sociale poussée à l’extrême, le confinement. Plus ou moins strict selon les États, son adoption avalise le fait que l’épidémie est présente et virulente. Il ne vise pas à stopper définitivement sa diffusion, seulement à la ralentir pour que le système hospitalier ne déborde pas. Dès lors, la question de la sortie du confinement devient très sensible pour éviter une éventuelle seconde vague.