L’art culinaire, une « bouée de sauvetage » pour de jeunes migrants à Paris

L’art culinaire, une « bouée de sauvetage » pour de jeunes migrants à Paris

Depuis deux ans, l’association Soul Food Paris aide les jeunes migrants, de 14 à 20 ans, à trouver leur voie à travers toutes formes d’art. Reportage au restaurant L’Ami Jean, dans le 7e arrondissement, où la cuisine permet à ces jeunes de s’en sortir.

Dimanche 23 février, au restaurant L’Ami Jean, dans le très chic 7e arrondissement de Paris, Aboudramane s’active derrière les fourneaux. « Le mafé, c’est toute mon enfance », raconte-t-il, tout en dressant une assiette de ce plat subsaharien composé de riz et de poulet, nappés d’une sauce aux arachides. La cinquantaine de convives, venue célébrer les deux ans de l’association Soul Food Paris, en redemande. « Ma mère me le cuisinait tout le temps. Je l’ai appelée pour lui dire que je préparais ce plat aujourd’hui : elle était très fière de moi », confie l’imposant jeune homme de 20 ans redevenu un garçon timide à l’évocation de sa mère.

Aboudramane a longtemps été habitué à l’ombre, vigilant, fuyant l’exposition et le risque d’être renvoyé vers la Côte d’ivoire qu’il avait fuie voilà plus de cinq ans. L’exil et la rue paraissent loin. « L’administration, c’était compliqué pour moi. Quand je suis arrivé en région parisienne, j’étais perdu, déboussolé. Je n’avais aucun soutien, aucun contact. » Jusqu’à ce qu’il frappe aux portes de l’Adjie, une permanence qui apporte une aide administrative et juridique aux mineurs et jeunes isolés étrangers. Il y rencontre François Le Louarn, cofondateur de Soul Food Paris. Avec cette association, qui offre aux jeunes migrants une échappatoire artistique, il va au restaurant. Là, il trouve sa voie, son issue. 

Du bénévolat à l’apprentissage

C’est attablé au Refettorio, sous la nef majestueuse de l’église de la Madeleine, dans les quartiers chics de Paris, qu’Aboudramane décide de faire de la cuisine son métier. Le jeune Ivoirien pousse timidement les portes de la cuisine du restaurant solidaire où il était venu dîner avec Soul Food Paris. Jusque-là bénéficiaire, il devient bénévole. 

« L’association Soul Food Paris vient régulièrement au Refettorio avec les jeunes mineurs et certains, comme Aboudramane, montrent un intérêt pour la cuisine », explique Maxime Bonnabry-Duval, chef du lieu. « Il venait régulièrement et cherchait une place en tant qu’apprenti dans une cuisine. Je l’ai donc mis en contact avec Stéphane Jégo, chef de L’Ami Jean », poursuit-il.

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Dix-huit mois d’apprentissage plus tard, Aboudramane surplombe avec fierté la salle du restaurant L’Ami Jean. « Ici, j’ai rencontré des personnes qui m’ont fait confiance, ont cru en moi, et m’ont aidé à apprendre le métier. C’est une fierté, d’être arrivé là, ça prouve que j’ai progressé dans mon apprentissage. Surtout, je me rends compte de la chance que j’ai », confie-t-il tout en dressant les assiettes et en accueillant timidement les compliments.

La cuisine restaure

Aujourd’hui, l’apprenti est chef. C’est lui qui est à la tête d’une brigade. Lui qui a préparé le menu. Lui qui mène la barre depuis le passe en zinc, gouvernail où le geste final est apporté. Le maestro, du haut de son mètre 90, envoie les assiettes en salle tout en gardant un œil sur sa brigade du jour, au parcours similaire.

Ilimas, 18 ans, régularisé en septembre, surveille la cuisson des volailles. Moussa, 17 ans, demandeur d’asile, sort le riz du four et Ibrahim, 40 ans, régularisé au bout de dix ans, met d’autres bananes plantains à frire. « Trop

Thierno

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